« La montagne de la maison du Seigneur se tiendra plus haut que les monts » (Mi 4, 1)
Publié le 27 Février 2016
C'était en 1953. L'expédition était partie le 10 mars. A plusieurs reprises, bravant le froid, l'altitude et le temps, quelques-uns avaient approché le sommet sans pouvoir conclure. Finalement, ce 29 mai, il revint à Edmund Hillary et au sherpa Tenzing Norgay, d'être les premiers à vaincre le ''toit du monde'' et fouler de leurs pieds endoloris le sommet vierge de la plus haute montagne du monde. C'est presque par surprise qu'ils prirent conscience d'y être parvenu. « Il n'y eut soudain plus rien autour de moi que l'espace, dans toutes les directions. Nous étions debout sur l'Everest », commenta Hillary. Mais combien de morts la redoutable cime garde-t-elle dans ses flancs ? Ceux qui avaient échoué avant la fameuse date de sa reddition. Ceux qui s'y essayèrent au cours des années jusqu'aujourd'hui.
Que d'énergie dépensée pour atteindre au Graal des alpinistes ! Que d'entraînement, que de renoncements, que de préparation pour une réussite incertaine ! Et pourtant, l'Everest, avec ses 8848 m., n'est pas la plus haute montagne du monde ni la plus difficile à conquérir. Il en est une autre, située, à Jérusalem qui requiert toutes nos attentions et toute notre énergie pour se laisser vaincre.
Le mont Golgotha est, en vérité, une bien modeste protubérance de rocher. Du temps du Seigneur Jésus, elle était plantée au milieu d'une ancienne carrière sise près d'une porte de la Ville Sainte. Les romains en avaient fait le lieu des exécutions publiques de sorte que tous ceux qui allaient et venaient puissent contempler avec crainte la poigne de fer implacable de l'occupant, châtiant les factieux et bandits de tout acabit.
Il lui fallut une force surhumaine pour escalader ce bout de roche grossier. Avec sa Croix, Il portait dans sa chair tous les péchés des hommes de tous les temps. Il traînait dans son sillage la marée humaine de tous les âges, incapable non seulement de l'aider, mais accrochant, comme des boulets à ses pieds, le fardeau de ses résistances à la grâce et l'ingratitude de sa légèreté agrippée aux biens qui ne peuvent la combler. C'était bien autre chose que l'Everest ! Ou plutôt un Everest spirituel inimaginable ! C'est la montagne du Seigneur où Il établit sa demeure. Cette maison de Dieu présent au milieu de nous, c'est le Corps ensanglanté de Jésus, dernier cri d'Amour et d'offrande, élevé sur la montagne du crâne pour que, désormais, se répande sur toute la planète les flots de la miséricorde jaillissant de son Cœur.
En juin dernier, j'ai eu la grâce de pouvoir y célébrer le Saint-Sacrifice de la Messe. J'avoue avoir été pris de vertige alors que j'élevais l'hostie puis le calice. Toute Messe puise en ce lieu sa puissance de grâce et de salut. C'est de ce lieu précis que jaillit la source inépuisable de la grâce divine qui s'écoule surabondamment dans tous les lieux du monde et dans toutes les époques, par la Sainte Messe. Le Calvaire, vaincu par le Grand Prêtre de notre salut, est bien le toit du monde d'où le Seigneur contemple les espaces vides de nos cœurs, de nos sociétés, de nos civilisations, dans toutes les directions. Il les contemple d'un regard amoureux pour les combler des flots de Sa vie donnée, encore et encore.
Pendant ce temps du carême, comment allons-nous rejoindre Jésus sur le mont Golgotha ? Comment allons-nous l'aider à porter sa Croix ? Comment allons-nous nous unir à Son sacrifice en vue de la rémission des péchés afin de renaître à la vraie vie et de ressusciter avec Lui ?
Ne faisons pas mentir la prophétie de Michée : « Il arrivera dans les derniers jours que la montagne de la maison du Seigneur se tiendra plus haut que les monts, elle s'élèvera au-dessus des collines. Vers elle afflueront des peuples et viendront des nations nombreuses » (4, 1-2a). Avec la Très Sainte Vierge Marie et saint Jean, tenons-nous vaillamment debout au pied de la Croix, pour que les eaux miraculeuses de la rédemption nous atteignent et atteignent tous les hommes !