de la vie monastique " Si vis perfectus esse. "
Publié le 19 Janvier 2017
L'idée de perfection est intimement liée à la notion de l'état religieux. Il implique dans son concept, le plein épanouissement de l'existence chrétienne; la vie religieuse c'est la vie surnaturelle évoluant vers sa perfection.
Mais qu'est cette vie surnaturelle, elle-même?
Si on l'envisage dans son principe, ce n'est autre chose que la grâce habituelle, avec le cortège des énergies et des dons sanctifiants qui l'accompagnent : ensemble harmonieux qui pénètre la nature, la purifie, l'élève et la transforme; organisme délicat et sensible, que doit mettre en branle la touche discrète des lumières et des bons mouvements actuels.
Dans cette économie de l'être surnaturel la grâce joue le rôle de substance, de seconde nature; les vertus infuses, la foi, l'espérance, la charité et les autres, sont comme les facultés; quant aux dons, ils constituent des aptitudes à obéir au souffle de l'Esprit, notamment en matière d'héroïsme chrétien.
La mise en oeuvre des facultés surnaturelles, l'activité de la foi, de l'espérance, de la charité surtout, c'est la vie surnaturelle dans son exercice. Elle a pour terme et pour effet l'union avec Dieu. Cette union se réalise particulièrement sous l'onction de la charité.
En provoquant les élans affectifs de notre coeur, l'amour céleste nous porte vers Dieu, et tout ensemble le rend idéalement et physiquement présent au plus intime de notre être, comme objet de pensée aimante et principe des forces surnaturelles qui la produisent. En même temps, la charité s'assujettit les énergies impératives de notre volonté pour les soumettre au bon plaisir du Seigneur. Elle tend ainsi à exercer son empire sur chacun de nos actes libres; et de la sorte elle devient, suivant la gracieuse comparaison de Saint François de Sales, la sève vivifiante qui communique à nos actions le parfum du Christ et la saveur du mérite céleste. Dans l'âme qu'elle anime se réalise la parole de l'Apôtre :" Ce n'est plus moi qui vis; c'est le Christ qui vit en moi."
Vous le voyez, la vie surnaturelle se ramène en quelque façon à l'exercice de la charité; Comme Dieu, le christianisme est amour; c'est l'amour affectif et agissant pour Dieu et pour le prochain, envisagé dans le rayonnement des complaisances divines.
Les trois voeux de religion visent à éloigner les effets de la triple concupiscence qui s'oppose dans l'âme humaine au règne de l'amour céleste: la concupiscence des yeux, la concupiscence de la chair et l'orgueil de la vie.
Dans le plan divin, les biens d'ici-bas sont un moyen; nous en faisons une fin; ils doivent nous servir et nous devenons leurs esclaves. Pour les acquérir, pour les conserver, le mondain sacrifie son temps, sa santé, sa conscience, sa vertu les plus strictes exigences de l'amour pour Dieu. Le plaisir n'est pas moins tyrannique. Dans l'ordre providentiel, il ne doit être que le stimulant et le condiment des activités légitimes.
L'homme trop souvent poursuit la jouissance pour elle-même, pour elle seule : il immole, pour se l'assurer, la paix de son âme et l'amitié de son Dieu . Quant à l'orgueil, dérèglement d'une tendance en soi légitime, qui nous pousse vers l'excellence et la grandeur, il a pour aboutissement normal la révolte, l'insubordination. Non serviam: telle est sa devise. " Je ne servirai pas, je ne servirai personne, pas même Dieu."
C'est pour écarter de son âme ce triple obstacle à l'épanouissement de la charité qu'un jour de sa profession le moine renoncera à la libre disposition des biens terrestres, qu'il captivera son coeur et ses sens sous le joug de la chasteté parfaite, qu'il enchaînera sa liberté dans les liens d'une continuelle obéissance.
Pour se prémunir contre la contagion du monde, où la triple concupiscence règne en souveraine, il mettra entre le monde et lui le mur d'une clôture austère.
(à suivre . )