Saint François d'Assise , priez pour nous.

Publié le 4 Octobre 2017

 

   Dès son adolescence, dans la période critique où le caractère en formation s'accuse le plus,  François est lancé dans la course aux plaisirs et il y tient la première place à une grande distance devant ses compagnons. Ce n'est pas qu'il soit beau et d'une noble stature, il est au contraire petit, brun, mais très vif. Plus tard il se comparera à une petite poule noire qui ne peut contenir sous ses ailes tous ses poussins.

   Son père, Pierre de Bernadone, était le plus riche marchand d'Assise. François plus ingénieux négociant que son père , n'était pas avare mais prodigue. Il disposait de beaucoup d'argent qu'il jetait par les fenêtres, aimant le fracas, la pompe extérieure, l'ostentation et le décor.  Grand ordganisateur de festins et de mascarades, aimant singulièrement les chants et les cantilènes, il parcourait les rues d'Assise très tard, le soir, scandalisant les bourgeois par ses frasques et jouissant par-dessus tout de ce scandale. Pour étonner la galerie, il se fit confectionner un vêtement de velours d'un prix inouï au beau milieu duquel il eut soin de coudre une larque loque. - Empressons-nous de noter, en soulignant le fait, que ses moeurs, parmi ce premier débordement de la jeunesse, demeurèrent toujours pures, ce qui prouve que François conservait un certain idéal de noblesse jusque dans ses excentricités, il était spontanément magnifique, à tel point que sa mère lui reprochait de se conduire " en fils de grand seigneur " plutôt qu'en fils  de marchand enrichi. Beaucoup parmi ceux qui le connaissaient le mieux prophétisaient qu'il deviendrait quelque chose de grand.

   Cette vie de plaisirs, de joyeux festins, de fanfaronnades, ne tarda pas à lui paraître insuffisante et creuse; elle ne menait à rien de solide et de grand. D'autres part le métier de marchand sentait trop la roture. Comme tant d'autres, mais avec plus de passion, François avait lu et relu les romans de la Table Ronde. La carrière chevaleresque le tenta. A cette époque précisément, le pape Innocent III avait fort à faire contre les troupes de Frédéric II. Devenir un paladin de la papauté et de l'Italie contre la Germanie, quel rêve!

   Il se procure aussitôt un équipement magnifique, qu'il donne d'ailleurs d'un geste magnanime à un noble soldat pauvre. La nuit suivante, en songe, il se voit amené par un personnage mystérieux au centre d'un palais splendide et spacieux; les murs sont tapissés de panoplies. Le personnage ou la voix lui assure qu'il deviendra le seigneur de ce palais. Il croit à ce songe comme à une révélation divine. Le matin il se lève, achète une nouvelle armure et part sur un cheval de bataille, enthousiasmé, le visage rayonnant de plaisir et de joie, l'oeil en feu. Les habitants lui demandent la cause de son bonheur, il leur répond :

" Je veux devenir un grand prince. "  L'ardeur de ses désirs lui donne réellement la fièvre; à la seconde étape il est contraint de s'aliter. Dans un nouveau songe, la Voix lui conseille de ne pas s'obstiner à suivre le serviteur; c'est au Maître même qu'il doit obéir, il faut revenir à Assise.

    Immédiatement François renonce à son entreprise. Il vend son coursier, troque son costume guerrier contre un habit commun et reprend la route de sa ville natale. D'aller guerroyer en Apulie, il n'en est plus question. Le jeune homme a changé d'avis. Il ne veut plus qu'on lui parle de guerre. Remarquons que cette volte-face dans ses projets ne produit en lui aucune tristesse. De même qu'il était, selon l'expression du chroniqueur, " tout à fait extravagant de joie " au départ, ainsi est-il joyeux au retour, car Dieu doit lui manifester sa grande vocation.

   Ses premières démarches dans la voie de la sainteté ne semblent pas, dès l'abord, moins démesurées que ses tentatives de vie joyeuse et chevaleresque. Sa conversion eut pour cause décisive une sorte d'extase survenue dans une rue d'Assise. François avait repris sa vie joyeuse. Dans un banquet nombreux et bruyant il avait été élu roi des plaisirs par ses compagnons, et comme emblème de sa royauté ceux-ci lui avaient offert un sceptre. Après le festin, au cours de la promenade nocturne, il se sent envahi par une douceur ineffable, il perd conscience de ses sens, s'arrête comme paralysé. Il avoua dans la suite qu'il fut tiré à grand'peine de ce ravissement par les interpellations de ses compagnons, venus à sa recherche. Ces derniers  lui demandèrent en plaisantant s'il était ainsi ravi en extase par la contemplation de sa fiancée. François leur répondit fort sérieusement que la fiancée qui lui était apparue était la plus noble, la plus riche et la plus belle dame qu'on eût jamais vue. Cette dame était la pauvreté évangélique.

   Il est évident que saint François depuis quelque temps était travaillé sourdement par un idéal de perfection religieuse. Il connaissait certainement la parole de Jésus au jeune homme riche " Si tu veux être parfait, va , et vends tout ce que tu possèdes."

   A cette époque, en effet, le conseil de la pauvreté évangélique faisait la préoccupation des âmes chrétiennes. Des essais , d'ailleurs téméraires, avaient été tentés pour rétablir parmi les fidèles à la vie commune . C'est pourquoi la conversion à la perfection chrétienne fut d'abord envisagée par saint François comme une conversion à la pauvreté évangélique.

   Etant donné ce que nous savons de la générosité et de la hardiesse de notre héros, nous pouvons nous attendre à ce qu'il accomplisse en quelques étapes le renoncement à toute espèce de possession.  Il invite d'abord, à la stupéfaction de sa mère, tous les pauvres qu'il rencontre à la table de famille; les mendiants prennent la place des compagnons de fête. François se jure de ne refuser l'aumône à personne. Son escarcelle était bientôt vidée, il donne son bâton, son chapeau, sa ceinture; il entraîne le pauvre à l'écart et lui passe sa chemise. Mais tout cela est peu de chose: faire la charité ne suffit pas, il faut se faire pauvre soi-même. Avant d'accomplir ce pas décisif, le jeune homme hésite; c'est que, malgré sa témérité plus apparente que réelle, il ne laisse pas d'être avisé et de se défier beaucoup de ses propres forces. Et à ce signe même nous pouvons diagnostiquer que cette fois la vocation est sérieuse.

   Le jeune homme conçoit le projet de faire l'essai réel et effectif de la pauvreté dans un pèlerinage à Rome. Il part. Arrivé au tombeau de l'apôtre saint Pierre, il rencontre un groupe de pèlerins, hommes du peuple, modestes bourgeois, qui déposent leurs aumônes derrière la grille avec cette parcimonie coutumière aux fidèles.  François à cette vue, se sent saisi par un de ces mouvements de générosité et de magnificence dont il n'était pas maître, et puisant dans son escarcelle une pleine poignée de pièces d'or , il les sème à travers la grille d'un geste large et royal. La pluie d'or carillonna sur le pavé des dalles et les pièces roulèrent jusqu'au tombeau.  Les pèlerins considérèrent avec stupéfaction ce jeune homme follement prodigue.

  François était heureux; en plus de son acte de générosité, il avait étonné ce peuple de pèlerins au coeur médiocre. Tout le François d'avant la conversion, avec son amour mélangé de bien et d'ostentation, nous semble symbolisé par ce geste princier qui sème les pièces d'or.

   Mais immédiatement il courut échanger ses habits contre les haillons d'un pauvre et il mendia l'aumône sous le portail de saint Pierre.

   Revenu à Assise, il commence son existence de pauvre et d'ouvrier. Il répare comme un manoeuvre les murs de Saint Damien. Il vient mendier son pain dans les rues de sa ville natale, couvert de haillons, la figure défaite, les cheveux et la barbe négligés; les gamins le poursuivent à coups de pierres et d'immondices. Son père le recueille, mais l'emprisonne dans la cave . Il réussit à se sauver. Cité devant le tribunal de l'évêque, il restitue à son père tout ce qu'il en a reçu et comparait devant les témoins et les juges. L'évêque lui donne gain de cause. Heureux d'avoir conquis sa pleine liberté, il part en chantant à travers les bois et la montagne; des brigands le rencontrent et lui demandent qui il est, il répond :

"  Je suis le héraut du grand roi."

   Ils le considèrent comme un insensé, le saisissent par les mains et les pieds et le projettent dans la neige du fossé. A quelque temps de là, dans l'église de la Portioncule, François entend lire, dans l'Evangile du jour, le récit de la mission des Apôtres . Ces paroles sont pour lui une lumière. Alors , définitivement, il comprend qu'elle est sa vocation: par la folie de la prédication il convertira le monde. 

Il se met à prêcher. On l'écoute, on le suit. Les premiers de ses disciples se joignent à lui. Il les envoie en mission deux à deux par les villages. Ils sont regardés par les uns comme des saints, par d'autres comme des fous. Des jeunes femmes fuient à leur approche. Fréquemment ils sont persécutés, maltraités, lapidés. Rentrés de mission dans leur grange près d'Assise, ils souffrent du froid, de la faim, mangent des raves au lieu de pain, se livrent à une contemplation continuelle.

Tels sont les premiers débuts de l'ordre des Mineurs.

  

rp Petitot. op +

Rédigé par Philippe

Publié dans #spiritualité

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