mars : mois de Saint Joseph . Saint Joseph , priez pour nous.
Publié le 1 Mars 2018
Saint Joseph est beau à contempler dans sa vraie grandeur, tout intérieure, toute spirituelle. Deux choses dénotent en cet ordre la grandeur véritable, deux choses qui sont rares à leur plus haut degré de perfection : c'est de savoir joindre son esprit à toute vérité divine et son coeur au coeur même de Dieu . Cela s'appelle théologalement la foi. Ceci, la sainte charité.
Dans cette foi comme dans cette charité il se révèle à certains égards si proche de nous et si pareil à nous que nous trouvons qu'il nous ressemble comme un frère et que nous croyons pouvoir le copier . Mais à certains autres égards il apparait si différent et si dépassant que notre dévotion nous porte à nous blottir tout petits contre lui comme à l'ombre d'une splendeur qui ne se reproduira jamais plus. Et notez que ces deux impressions sont également fondées: la spiritualité si haute de cet homme, qui fut si chrétien avant la lettre, sans doute nous demeure inaccessible, mais non pas inimitable, car elle est de même trempe et de même espèce que la nôtre. Son cas est singulier, mais il reste le prototype du nôtre.
Saint Joseph, il me semble que je peux le définir: un grand coeur qui a connu un grand amour et a vécu de cet amour.
Dieu seul a pu lui donner l'un et l'autre, car seul il crée les grands coeurs et forme les grands amours.
Mais Joseph s'est prêté merveilleusement à l'un comme à l'autre, et ce n'est pas rien de porter en soi le poids de sentir le battement d'un grand coeur, et ce n'est pas rien non plus que d'être consumé et transporté d'un grand amour . On connait assez le solennel aveu :
Seigneur, vous m'avez fait puissant et solitaire
Et vous m'avez sevré des plaisirs de la terre.
Joseph a eu le mérite de laisser Dieu lui pétrir et lui façonner le coeur, et le mérite d'accueillir toujours magnifiquement le bel amour qu'y voulait imprimer ce même Dieu.
Nous disons de la très sainte Vierge qu'elle est " mère du bel amour ". De son époux nous pouvons dire qu'il est un véritable prince du bel amour. Les grands coeurs ne s'improvisent pas, ni non plus les grands amours. Il y faut de lentes préparations, une grâce toute divine, toute la plasticité humaine. Surtout quand il s'agit comme ici d'un cas inouï de charité. Car il ne se sera jamais rien vu de tel en l'ordre de l'amour.
Le plus noble coeur d'homme, le mieux fait pour recevoir et pour rendre les plus divines tendresses, tel est saint Joseph..
Son divin amour ne lui est advenu que parce qu'il s'en était montré digne et qu'il s'y était constamment disposé par la délicatesse et par l'élévation des sentiments de son coeur. On a généralement dans la vie l'amour que l'on mérite. Parce qu'il s'était toujours beaucoup gardé, beaucoup sanctifié, le coeur de Joseph était prédestiné aux plus parfaites dilections. C'est pourquoi, lorsque celles-ci lui survinrent, il s'y donna tout entier, il s'y consacra et s'y consomma. Et l'on eut dans sa façon d'aimer la mesure même de sa capacité d'aimer.
En revanche , ces hautes et saintes dilections ennoblirent encore davantage et embellirent un coeur si bien préparé à les recevoir. Le grand amour a véritablement transformé ce grand coeur et se l'est approprié tout à fait. Il est devenu l'unique amour. Joseph n'en a plus connu d'autre. Mais dans cet unique amour il a trouvé non point un amoindrissement , mais un agrandissement de son coeur. De même qu'il y a rencontré aussi non pas l'effacement, mais l'inspiration et l'épanouissement de toutes les affections qu'un grand coeur peut porter en soi.
En somme, si l'on veut se rendre compte comment saint Joseph a su aimer, il faut considérer tour à tour de quelle manière son coeur s'est préparé au plus divin amour qui se pût offrir à lui, et de quelle manière cet amour est venu prendre forme dans le coeur de cet homme , le grandir et le parfaire encore, et en transformer du même coup tous les amours.
Le coeur de saint Joseph se prépare au grand amour.
Je cherche à me définir quelle est la qualité de ce coeur et quelle en est la faculté d'aimer. Mais qui saura discerner des choses aussi intimes? Ce sont là de profonds secrets qu'on peut à peine analyser en soi-même; comment pourrait-on les découvrir et les analyser chez un autre? Sans doute. Mais il faut réfléchir que cet autre ici est au principe de notre vie spirituelle. Il est de ces grands êtres en qui s'est pour ainsi dire incarné au contact immédiat du Sauveur notre salut à tous. A cause de cela il a dû comme la Vierge, comme le Christ, laisser percer pour notre vie à nous quelque chose du secret de la sienne.
De plus, une autre lumière nous guide en cette recherche. Si saint Joseph a dû aimer et a su aimer comme il a fait Jésus et Marie, c'est qu'il était apte à le faire. Nous en sommes sûrs, quand même on ne nous le dirait pas. Alors, si nous voulons connaître le coeur de Joseph, il nous suffit de déterminer quelle sorte d'homme pouvait être digne d'aimer cette Vierge et chérir cet Enfant. Et nous pouvons par là deviner quels dons de nature et de grâce ont concouru à former le coeur de saint Joseph.
Coeur de jeune homme, mais de jeune Israélite. Il a donc de la race, du raffinement, de la culture, en particulier dans le sentiment religieux et pour tout ce qui touche à la cause de Dieu en ce monde.
De saintes traditions, séculaires et vénérables, l'ont précédé, et préformé pour ainsi dire. Elles l'enveloppent, le réchauffent , le pénètrent , l'inspirent, l'enthousiasment même. L'approche de temps nouveaux, le pressentiment de l'ère messianique, l'atmosphère haletante et recueillie qui respirent les meilleures âmes en Israël, rendent ce jeune Juif encore plus sensible, plus ouvert, plus vibrant.
Joseph a reçu des siens, de ses parents, de ses maîtres, de ce qui a composé d'âge en âge et compose encore de son temps l'élite d'un peuple élu, une extrême sensibilité, une espèce de religieuse finesse en amour. Ce jeune coeur en Israël à ce moment-là on peut se le représenter comme étant d'une essence très spéciale et très pure.
Joseph est dans nos Ecritures authentiquement qualifié juste. Mais à ce titre, à cette époque et dans ce milieu-là, est quelque chose de bien défini: il peint son homme , il trace un caractère.
C'est le véritable Israélite en qui il n'y a pas d'artifice, en qui tout est droiture et sincérité. C'est le Juif à l'âme délicate et profonde, né moins de la chair que de l'esprit, à cause de cela très spiritualisé, tout disposé d'ailleurs à renaître de plus haut encore, et tout proche de l'heure où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité.
Joseph est en outre de la maison de David.
Il semble bien qu'il en ait vivement conscience; et il est certain que ce n'est pas pour en tirer quelque vaine gloire. Ce souvenir cultivé en lui ajoute à sa dignité native. Cette noblesse l'oblige. Elle éloigne de lui toute médiocrité et l'entretien dans la magnanimité. Elle est transparente à travers la simplicité de la vie . Sous ses dehors d'artisan ce jeune homme a des airs de roi.. Lui qui ne saura jamais que se soumettre et s'effacer, vous ne le verriez pas moins bien fait pour régner. Fils du peuple, il en pourrait être le père .
Il a des manières douces et affables . Il est de relation agréable et serviable. Sa conversation discrète et mesurée est toujours empreinte d'intelligence et de bonté. Un tact parfait règle tous ses actes . On le trouverait sans doute un peu distant à force même de perfection, la plus touchante ingénuité, ne tempéraient visiblement ce qu'il y a en lui de si grand. On ne peut imaginer quelqu'un de plus gracieux ni de plus aimable qu'il n'est, ni qui soit plus donnant, de sa personne, de sa bonne humeur et de ses biens. Il est prévenant et délicieux avec tous. Il écoute avec respect disserter les vieillards et avec une charmante condescendance habiller les enfants . Il est pitoyable aux malheureux .
Nul doute que , sous l'action du Dieu intérieur qui l'habite et l'anime, ce brave coeur ne s'élève à la plus haute conception de l'amour.
Il se persuade que c'est une rare et divine chose que l'amitié, le signe certain d'une grande âme. Il se persuade aussi que Dieu lui-même est amour, et que celui qui demeure dans la dilection demeure en Dieu.
Dans cette persuasion aimer devient pour lui une chose sainte. Non la recherche de jouir quand ce n'est pas celui de dominer, mais le penchant à servir et à se dévouer. Il ne s'agit pas de subtils recours ni d'égoïstes repliements sur soi, mais d'une généreuse oblation et d'un complet et désintéressé don de soi . Etre aimé, oui, aimer d'être aimé, car la réciprocité est essentielle à l'amitié; mais tout juste ce qu'il faut pour pouvoir aimer et pour pouvoir se donner: aimer d'aimer bien plus que s'inquiéter d'être aimé.
Voilà à quoi aspire ce jeune et séduisant Israélite qu'est Joseph fils de David.
Le grand commandement qui domine toute l'histoire et la vie d'Israël flambe en lui comme du feu.
Ah! certes oui, il aime Dieu de tout son esprit, de tout son coeur, de toute son âme, de toutes ses forces. Il ne conçoit même pas qu'on ne puisse pas l'aimer de la sorte . Son enfance, son adolescence, sa jeunesse, n'ont été qu'un pur élan vers Dieu . Il aime Dieu précisément comme tous ses ancêtres l'ont aimé. Pour Joseph, ce Dieu n'a jamais été une abstraction ni quelqu'un de lointain, mais le Seigneur tout proche dont l'invisible majesté l'enchante et l'attendrit, le Dieu vivant et vrai, Père de tous ses pères, Providence bénie de tous les siens . Il le sent si présent, si ami, si aimable, que tout son être s'émeut à ce contact intime . Joseph pleure de tendresse pour son Dieu lorsqu'il médite en les rajeunissant et en les dépassant les grandes effusions lyriques de ses anciens.
Il n'a pas de peine non plus , si jeune qu'il soit, à comprendre et à aimer en Dieu tout le prochain. Il aime autrui comme si c'était encore aimer Dieu. S'il a pour son Seigneur une amitié si vive qu'on la dirait humaine, on lui voit pour tous les siens une amitié comme qui dirait divine. On lui reconnait une étrange facilité à surélever et à surnaturaliser tous les mouvements de son coeur.
Il est foncièrement spirituel et religieux en amour . Il éprouve les sentiments les plus délicats pour ceux que Dieu veut bien lui donner à aimer. Il les accueille et les reçoit en lui comme de la main de Dieu. Il les aime sous le regard et sous l'approbation de Dieu .
Une lumière divine éclaire à ses yeux toutes les amabilités, transforme tous les attraits. Il n'y a de beauté pour lui que dans le rayonnement des annonces et des possibilités messianiques. Ses jeunes parentes lui plaisent selon qu'elles préfigurent la Vierge qui sera choisie pour enfanter l'Emmanuel et les jeunes gens de son temps lui sont facilement l'image même de ce Messie qui doit surgir en Israël.
Rp Bernard op+