ecce Mater tua.

Publié le 9 Août 2018

  

   Lorsque, du haut de la Croix, Jésus nous disait: Voilà votre Mère, nous devons croire qu'il pensait à la phase céleste de la maternité de grâce. Il voulait dire: Voilà votre Mère pour l'éternité. Il avait alors une vue trop saisissante de tout son corps mystique, il déchirait trop vivement les temps et les espaces et s'appliquait trop intensément à y infuser les réalités éternelles, pour que la très sainte Mère qu'il nous donnait ne lui apparût pas dès cet instant tout investie du rôle transcendant qu'elle méritait à ses côtés.

   Cependant Jésus en mourant demeurait aussi trop attentif à tout ce qui l'entourait, à tout le détail concret des personnes et des choses, pour ne pas vouloir dire à saint Jean, le benjamin et le préféré de ses apôtres: Voilà votre Mère, je la laisse avec vous pour un temps. Et, ce faisant , il avait en vue sans nul doute le restant des actes terrestres de la maternité spirituelle. C'était pour nous signifier: Elle n'a pas encore fini de mériter pour vous, son existence parmi vous n'est pas tout à fait terminée, elle a encore un rôle à remplir. Et c'était donner l'ordre que saint Jean comprit et exécuta en effet :" A partir de maintenant, prends-là chez toi", garde-là dans ta maison, c'est elle qui te gardera, sa présence au milieu de vous sera le prolongement de la mienne.

   Il saute aux yeux que le Christ, dans cet agencement délicat des évènements, ne peut avoir d'autre dessein que celui-là. S'il impose à sa Mère de survivre ici-bas, ce n'est certainement pas pour lui, ce n'est pas non plus tellement pour elle, c'est manifestement pour nous. La Mère de Jésus étant là, ces tout premiers chrétiens auront la sensation bienfaisante et réconfortante de ne pas être orphelins. Et cette vénérable petite femme, si modeste et si fluette d'apparence, si grande et si forte par le coeur, est évidement chargée de veiller sur cette chrétienté naissante un peu comme elle a veillé sur le Christ enfant.

   L'éclosion et la première expansion de cette nouvelle Eglise, au sein d'une autre qui va bientôt la répudier et dans un monde qui sera, lui , toujours hostile, devait être quelque chose de tendre et de frêle comme la naissance et les premiers jours d'un nouvel être.

   Alors on comprend si bien la place providentielle et l'action en quelque sorte sacramentelle de la douce Vierge Marie à ce primitif foyer de tout le christianisme. Selon beaucoup de vraisemblance, Marie s'installe à demeure au centre même de Jérusalem. Mais tandis que cette Jérusalem va de plus en plus se comporter comme une marâtre, c'est la Sainte Vierge qui va de plus en plus se révéler " notre vraie mère à nous et la vivante image de la Jérusalem d'en-haut "  Gal. IV,26, c'est elle qui, visiblement même, va nous créer ce foyer où doit naître l'Eglise de Jésus-Christ et d'où cette Eglise doit commencer de s'étendre sur la terre.

...

   Il devient de plus en plus évident que les conditions de cette vie ne suffisent pas à l'exercice de cette maternité spirituelle. Et il me semble que j'entends la divine Mère nous répéter, à mesure précisément que la comprenant mieux nous l'entourons de plus de respect et plus d'amour :"

   Mes petits, que votre coeur ne se trouble point... Oui, vous avez raison, croyant en votre Christ, de croire aussi en moi... Cependant, je vous l'assure, il vaut mieux pour vous que je m'en aille... Car là où je vais, je veux que vous veniez aussi. Y étant moi-même, je vous préparerai la place, et je pourrai faire plus que je ne puis à présent ici-bas pour vous attirer auprès de moi .... jean XIV,I-3  Ne me retenez donc plus, tant que je ne suis pas montée vers mon Fils. Mais dites à mes enfants que je monte, et que je sens que je m'en vais vers lui, qui est mon Dieu et votre Dieu. " Jean XX, 17

   Et elle s'en va effectivement, la douce Vierge Marie. Il apparaît , à qui sait voir, que le meilleur d'elle-même est déjà dans les cieux et qu'elle n'a même pour ainsi dire plus à attendre que vienne comme Sauveur son Seigneur et son Fils . Phil. III, 20

   Evidemment, cette femme est dans la Parousie du Christ bien-aimé . Maran atha: le Seigneur vient !

   Usant du pouvoir qu'il possède de s'assujettir toute chair, il " transforme " , insensiblement et avec le temps, pour le rendre semblable à son corps glorieux, ce corps de la très sainte Vierge d'où le sien a tiré sa substance immortelle. Ne sont- ils pas à eux deux un seul coeur et une seule chair ? Marie n'est-elle pas celle qui a été conçue et qui a toujours vécu sans péché? Quoi d'étonnant qu'à son égard la mort, la redoutable mort, ait perdu sa victoire et n'ai plus son aiguillon et qu'elle soit engloutie dans la victoire du Christ ! N'est-il pas normal que cette créature unique, qui a donné naissance au Verbe incarné et qui nous a tous conçus en lui, soit appelée, bien avant nous tous et très peu après lui, à se revêtir d'incorruptibilité et d'immortalité? I Cor. XV. 52,56

   Elle s'en va, la sainte femme, bien plus chargée d'âmes qu'elle n'est chargée d'ans. toute affinée, toute intériorisée, toute extasiée, elle n'a l'air d'être absente que parce qu'elle est autrement et supérieurement présente .

  La volonté qu'elle a de nous donner toutes aides pour la vie de la grâce et le besoin que nous avons de recevoir cette aide maternelle, l'emportent vers Dieu avec une force égale. Ni sa prière ni son intercession ni son action ne sont dorénavant à la mesure du temps présent :une irrésistible intensité, une incommensurable immensité, la leur font dépasser. Tout ce qui arrive aux membres du corps mystique se répercute dans l'âme de Marie avec une sorte de retentissement en toutes manières illimité. Qui est faible sans qu'elle le voit aussi? Qui souffre scandale sans qu'un feu la dévore?  Elle sent grandir en elle le souci de toutes les Eglises, et pour elle c'est une application à laquelle elle ne peut plus suffire au jour le jour . II Cor. XI, 28,19

   L'éternité l'appelle et l'assume: elle conçoit trop grandement le Christ dans la gloire et les chrétiens dans le Christ.

   " Tout nous appartient, se dit-elle, le monde, la vie et la mort, le présent et l'avenir: tout est nôtre; mais nous-mêmes nous sommes au Christ , et le Christ est en Dieu. "  I Cor. III, 21-23

 

  

rp Bernard op+

 

 

Rédigé par Philippe

Publié dans #spiritualité

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