mois de St Michel : je renonce à Satan . (2)
Publié le 30 Août 2018
... Voilà en quelque sorte, le fonds radical de la puissance satanique: la tolérance divine qui permet à la nature démoniaque de mettre en action ses vertus originelles, dussent-elles travailler à conduire l'homme au mal.
Le démon , au reste, trouve dans l'homme un allié, toujours prêt à seconder son oeuvre. Le péché lui donne un pied-à-terre dans un coeur et dans une vie; c'est là sa vraie raison d'être dans une âme, surtout quand le péché commis l'a été à son instigation. Il triomphe et y trouve un titre spécial à tenir l'homme sous sa tyrannie. " Celui qui se laisse surmonter par le démon en devient l'esclave, a quo enim quis superatus est, hujus et servus est " 'II Petr. II, 19
C'est ce qu'exprime Bossuet dans sa langue puissante :" Et le Seigneur dit: Simon, Simon; je t'appelle deux fois, sois attentif. Satan a demandé à vous cribler tous vous autres, comme on crible le froment. (Luc XXII,31)
Quelle puissance de Satan! cribler les hommes, les apôtres mêmes, les agiter, les jeter en l'air, les précipiter en bas, en faire, en un mot, tout ce qu'il veut. Qui a donné ce droit à Satan, sinon le péché? C'est par le péché qu'il a vaincu l'homme, qui, en suite de la victoire, lui a été livré comme son esclave. C'est pourquoi il en use avec un pouvoir tyrannique; néanmoins il ne fait rien de lui-même , il demande: c'est une puissance maligne, malfaisante, tyrannique, mais soumise à la puissance et à la justice suprême de Dieu.
Ainsi l'action perverse du démon sur nos âmes, permise par Dieu , est facilitée par l'homme lui-même, qui se soumet à lui par le péché. Le péché originel donne à Satan un certain empire sur tous les hommes; chaque péché volontaire augmente sa puissance sur l'âme qui l'a commis .
Il est aisé, par là , de fixer les limites du pouvoir diabolique. Il est certain que l'homme peut, avec la grâce de Dieu lui résister et le vaincre. La volonté humaine est un asile imprenable.
Le démon n'y peut entrer qu'autant qu'on lui ouvre la porte. " C'est en vain, dit saint Augustin, que le démon te suggère une idée; il ne peut rien que par ton consentement; il ne saurait forcer ta volonté . "
Saint François de Sales n'est ni moins rassurant, ni moins explicite :" Ne vous troublez point, ma fille bien-aimée. Se faut-il laisser emporter au courant et à la tourmente? Laisser enrager l'ennemi à la porte; qu'il heurte, qu'il bucque, qu'il crie, qu'il hurle et fasse du pis qu'il pourra : nous sommes assurés qu'il ne saurait entrer dans notre âme que par la porte de notre consentement. Tenons-la bien fermée, et voyons souvent si elle n'est pas bien close; et de tout le reste ne nous en soucions point, car il n'y a rien à craindre. "
L'homme peut donc opposer au démon une résistance indomptable; sa volonté peut se dresser comme un mur infranchissable, en face de ses assauts les plus furieux.
" Son désir le plus ardent, dit saint Jérôme, est de nous renverser tous; mais, s'il peut persuader, il ne peut pas précipiter dans l'abîme . " Sont pris au piège ceux qui s'opposent. Et c'est encore cette même idée qu'exprime saint Augustin, quand il compare les démons à des chiens à la chaîne; ils ne mordent que ceux qui s'approchent: ils peuvent aboyer, ils peuvent solliciter, ils ne déchirent que ceux qui le veulent . "
Si bien qu'au fond, derrière cette façade de grandeur et de puissance se cache, chez le démon, une vraie faiblesse que Bossuet décrit ainsi : " Il est fort contre les lâches et les timides, mais très faible et impuissant pour les courageux. En effet, nous voyons dans les saintes Lettres qu'il nous y est représenté tantôt fort, tantôt faible, tantôt fier et tantôt tremblant; et il n'y eut jamais une bête plus monstrueuse. C'est un lion rugissant qui se rue sur nous; c'est un serpent qui rampe par terre, et il n'est rien de plus aisé que d'en éviter les approches . " Il tourne autour de vous pour vous dévorer. " Mais résistez-lui seulement, et il se mettra en fuite: " Resistite diabolo, et fugiet à vobis."
- Ecoutez comme il parle à notre Sauveur : Qu' y a-t-il entre toi et moi, Jésus, fils de Dieu ? (Luc VIII,28) . Voilà un serviteur qui parle bien insolemment à son maître; mais il ne soutiendra pas longtemps sa fierté. Et je te prie , dit-il, ne me tourmente pas :" Obsecro te , ne me torqueas. Venisti ante tempus torquere nos " (Matth., VIII, 29)
Voyez comme il tremble sous les coups de fouet... Enfin, est-il rien de plus méprisable que toute cette grandeur qu'il affecte, puisque, avec cette intelligence qui le rend superbe et toutes ces qualités extraordinaires, nous lui semblons néanmoins dignes d'envie; et tout impuissants que nous sommes, il désespère de nous pouvoir vaincre, s'il n'y emploie les ruses et la surprise. "
De plus, Dieu , Maître du démon , comme de toute créature, met un frein à ses appétits et appose des limites à son action.
" Laissez-le se morfondre, et tenez toutes les avenues bien fermées, écrit saint François de Sales, à Mme de Chantal; il se lassera enfin, ou s'il ne se lasse, Dieu lui fera lever le siège. "
' Il est vrai que le démon a ses forces entières , dit aussi Bossuet, . Mais Celui qui les lui a laissées pour son supplice, lui a mis un frein dans les mâchoires, et ne lui lâche la bride qu'autant qu'il lui plait . '
Au reste, voici la doctrine de l'Eglise sur ce point : " Quelles que soient la puissance, l'obstination et la haine du démon contre nous, il ne peut cependant nous tenter et nous tourmenter ni autant ni aussi longtemps qu'il le voudrait. Tout son pouvoir dépend de la volonté de Dieu, et il ne s'en sert que par sa permission. On connaît l'exemple de Job, que Satan n'eût jamais touché si le Seigneur ne le lui eût point dit :" Voilà, je te livre tout ce qu'il possède . " Mais si Dieu n'avait pas ajouté :" Seulement n'étends point la main sur lui" , Satan l'eût fait périr d'un seul coup avec ses enfants et tous ses biens. Et même la puissance des démons est tellement liée, qu'ils n'auraient pas pu se jeter, sans la permission de Dieu, sur ces pourceaux dont il est question dans l'Evangile . "
Le pouvoir d'éprouver les justes, conclurons-nous avec saint Augustin, n'appartient donc à Satan que dans une certaine mesure . " Cette mesure , nous la connaissons. " Dieu est fidèle, dit l'Apôtre, et il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces . Par là saint Paul montre que le secours est toujours placé auprès de la tentation. Mais qui peut déterminer dans quelle mesure il est accordé, si ce n'est Dieu lui - même . ? Lui seul connait et pénètre le coeur intérieur qui lui échappe :" Il rôde snas cesse autour de nous; il examine de toutes parts chacune de nos vertus théologales, cardinales et morales, et, lorsqu'il a découvert en nous l'endroit le plus faible et le moins pourvu des armes du salut, c'est par là qu'il nous attaque et qu'il tâche de nous prendre .
Dieu , " qui pèse les esprits " , accourt alors à notre aide. " Pour que la lutte ne soit pas inégale, dit saint Thomas, il y a comme compensation , du côté des hommes, d'abord et principalement le secours de la grâce divine; et, en second lieu, la garde des bons anges . "
Ne crains pas, disait Elisée à son serviteur: ceux qui sont avec nous sont plus nombreux que ceux qui sont avec eux . "