Hermanitas Discípulas del Cordero
Publié le 26 Juillet 2019




Les Petites Sœurs Disciples de l'Agneau qui vivent au centre de la France forment la première communauté contemplative au monde à accueillir des personnes atteintes du syndrome de Down dans la vie consacrée.
Cette aventure spirituelle et humaine, vécue sous le patronage de saint Benoît et de sainte Thérèse de Lisieux, est née dans les années 80, d'une amitié entre Line, une jeune femme en recherche spirituelle qui voulait vivre sa vocation au service des petits, et Véronique, une jeune femme avec le syndrome de Down qui voulait se consacrer au Seigneur. Un précieux rapport de Cyprien Viet.
"J'ai visité plusieurs communautés qui accueillaient des personnes handicapées, mais j'ai découvert que ces personnes ne trouvaient pas leur place dans ces communautés parce qu'elles ne leur convenaient pas ", explique Mère Nature, qui est rapidement devenue la mère supérieure des Petites Sœurs Disciples de l'Agneau. "Et c'est la rencontre avec la jeune Véronique, une fille trisomique, qui nous a inspiré un nouveau départ. Je me suis promis de l'aider à accomplir sa vocation.
Véronique avait senti l'appel à servir le Seigneur, mais le syndrome de Down l'avait rejetée dans toutes les communautés où elle était allée. En fait, le droit canonique et les règles monastiques ne prévoient pas l'admission des personnes handicapées mentales à la vie religieuse. Il faudra 14 ans à Line et Véronique pour que les statuts de cette communauté particulière, qui a son propre style original, soient reconnus.
Le début de Line et Véronique a eu lieu en 1985 dans un petit appartement, une maison populaire ; successivement, une autre jeune femme atteinte du syndrome de Down s'y est jointe. Jean Honoré (1920-2013), archevêque de Tours et futur cardinal, pour les reconnaître, dans un premier temps, comme une association publique de fidèles laïcs. L'appui du cardinal Honoré, qui défendra leur cause à Rome, leur a permis de donner à cette communauté sa première reconnaissance.
En 1995, le nombre croissant de "membres" oblige les Petites Sœurs à déménager : elles s'installent sur une propriété au Blanc, une ville de 6 500 habitants dans le diocèse de Bourges. Mgr Pierre Plateau (1924-2018), archevêque de ce diocèse du centre de la France, les a accueillis chaleureusement et son intervention les a aidés à poursuivre leur cheminement à Rome, en vue d'obtenir le statut d'institut religieux contemplatif qu'ils ont finalement obtenu en 1999. "Mgr Plateau était vraiment un père pour notre communauté : il était très proche des personnes atteintes du syndrome de Down ", dit Mère Line. Les sœurs ont progressivement développé le prieuré et la chapelle et en 2011 elles ont obtenu la reconnaissance définitive de leurs statuts, grâce à l'intervention de Mgr Armand Maillard, qui avait aussi apporté son soutien à la communauté, source de vie et de joie dans ce territoire.
Les Petites Sœurs Disciples de l'Agneau sont actuellement au nombre de 10 : deux sœurs capables et huit atteintes du syndrome de Down. La communauté reste fragile et espère accueillir bientôt d'autres sœurs compétentes, car les sœurs duvet ont besoin de soutien dans leur vie quotidienne. Mais, en réalité, "elles sont autonomes, car la vie contemplative leur permet de vivre à un rythme régulier. Pour les personnes atteintes du syndrome de Down, les changements sont difficiles, mais lorsque la vie est très régulière, elles la gèrent bien ", explique mère Line.
La vie quotidienne passe par les fonctions quotidiennes, la messe est célébrée tous les mardis dans la chapelle et les différentes activités : ateliers de tissage et de céramique et, plus récemment, la création d'un jardin de plantes médicinales. Bref, sa vocation extraordinaire s'exprime dans la vie ordinaire, dans l'humilité du service, en suivant le "petit chemin" révélé par sainte Thérèse de Lisieux, dont la spiritualité est sa grande source d'inspiration.
"Cela fait 34 ans que je n'ai pas ressenti l'appel de Jésus. J'ai essayé de connaître Jésus en lisant la Bible et l'Évangile, dit Sœur Véronique. Je suis née avec un handicap appelé syndrome de Down. Je suis heureuse, j'aime la vie. Je prie, mais je suis triste pour les enfants trisomiques qui ne ressentiront pas la même joie de vivre. Pour ceux qui se sentaient appelés à vivre, comme sainte Thérèse, la vocation à l'amour, le chemin a été long mais leur patience et leur foi ont payé. "Jésus m'a fait grandir dans son amour. Après avoir été rejetée dans la communauté, ma joie a été quand, le 20 juin 2009, j'ai pu faire mes vœux perpétuels à l'Institut des Petites Sœurs, disciples de l'Agneau. C'est ma plus grande joie d'être l'épouse de Jésus.
"A une époque où la société, sans repères, ne semble plus trouver de sens à la vie ni lui donner de valeur, notre communauté veut, par le simple témoignage de notre vie consacrée à Dieu, réaffirmer le caractère sacré de la vie et de la personne humaine, disent les Petites Sœurs.
Pour que toute la force de l'amour inscrit dans le cœur de ces jeunes femmes trisomiques s'exprime pleinement dans une vie consacrée au Seigneur, les Petites Sœurs nous invitent à un moment de discernement " des jeunes touchés par l'esprit de pauvreté et de dévotion, prêts à offrir toute une vie au service du Christ dans les personnes de leurs petites sœurs trisomiques. Pour ces mêmes jeunes femmes atteintes du syndrome de Down, "le discernement se fait comme pour toutes les autres vocations : quand une personne se réalise, c'est là que le Seigneur l'appelle. Sinon, elles rentrent chez elles. C'est comme toute vocation. Elles savent très bien comprendre si ce n'est pas une vraie vocation ", explique Mère Line.
Mère Line trouve chez les sœurs trisomiques une force spirituelle incroyable. "Elles connaissent la Bible, la vie des saints, elles ont une mémoire fabuleuse. Ce sont des âmes de prière, très spirituelles, très proches de Jésus", dit-elle avec étonnement, voyant dans leur simplicité un signe prophétique pour notre temps. "Leurs âmes ne sont pas handicapées ! Au contraire, elles sont plus proches du Seigneur, elles communiquent plus facilement avec Lui. Les sœurs habiles de la communauté apprécient particulièrement leur capacité de pardonner, la capacité d'encourager leurs sœurs en trouvant la bonne phrase de la Bible qui donne un sens à la journée.
La communauté a été marquée en 2013 par le décès prématuré, à l'âge de 26 ans, de Sœur Rose-Claire, religieuse entourée d'une aura de sainteté, sur les traces de sainte Thérèse de Lisieux, qu'elle aimait beaucoup. Mère Line raconte la réaction des Petites Sœurs trisomiques, dont elle craignait une grande sensibilité émotionnelle, mais qui ont finalement accueilli cet événement avec sérénité, mettant tout sous le regard de Dieu. "Quand le lendemain matin je suis allée dans leur cellule pour leur en parler, la première m'a dit:'C'est le désir du ciel' ; la seconde m'a encouragée: 'Nous devons résister'. Ayons la foi".
L'expérience atypique de cette communauté semble vraiment répondre à un désir de paradis ainsi qu'à un défi anthropologique pour le monde d'aujourd'hui, soumis aux impératifs d'efficacité et de productivité, où les personnes atteintes du syndrome de Down sont réduites au silence. Leur capacité d'amour et, pour ceux qui ont reçu le don de la foi, leur proximité au Seigneur, cependant, sont porteurs d'une fécondité insoupçonnée. "C'est certainement un monde à découvrir ", conclut Mère Line. "Elles apportent la joie à la société et, surtout, elles apportent l'amour au monde qui en a tant besoin.
Devant nos yeux et en écho aux premières paroles de Jean-Paul II, cela signifie oser dire " n'ayez pas peur " d'un monde dans lequel l'homme a peur de l'homme, des faiblesses inhérentes à sa nature et à sa condition, comme le handicap ou la maladie. C'est oser affirmer, plus que jamais, la beauté et la grandeur de la vie dans son mystère de souffrance.
N'ayez pas peur de suivre Jésus et de partager cette vie offerte à nos Petites Sœurs, certes fragile, mais non sans force, au contraire, forte au plus haut niveau : celle du cœur.
N'ayez pas peur de témoigner, aux yeux du monde, d'une vocation généreuse, orientée vers les autres et capable de dépasser la condition des handicapés, trop souvent marginalisés, et capable de vous ouvrir plus profondément à un regard pleinement humain.