la prière.
Publié le 16 Février 2021
La prière est le plus haut exercice de vaillance qui soit. Il exige un élan sans cesse renouvelé de tout l'être. Un ancien règlement français de cavalerie a cet axiome admirable :" Jette ton coeur par-dessus l'obstacle et ton cheval ira le chercher ! " L'obstacle est ici l'univers entier. Il faut jeter son coeur le plus loin possible, par delà les sommets du ciel.
La prière, c'est l'ombre de la mort sur notre âme. " Quand je traverserais l'ombre de la mort, je ne redouterais rien, parce que Tu es avec moi. "
Dieu n'est avec nous que si nous avons d'abord consenti à traverser cette ombre horrible de la mort. On se met en présence de Dieu comme on meurt. Mourir, c'est abandonner son âme. Prier, c'est aussi détacher son âme de tout et de soi-même , pour l'abandonner aux mains de Celui dont saint Paul a écrit qu'il est horrible de tomber aux mains du Dieu vivant.
Oui , c'est bien le moment de déployer toute sa vaillance et comme me le disait un petit Français de six ans :" Je ne recule jamais. - Alors , c'est que tu n'as jamais peur ? - Oh si, j'ai peur, mais quand j'ai peur, j'avance!"
La prière est vraiment l'ombre de la mort: elle en a la forme et toutes les exigences. Le langage chrétien dit d'ailleurs de quelqu'un qui vient de mourir: il a paru devant Dieu. C'est bien une expression équivalente à celle : mettons-nous en présence de Dieu. C'est pourquoi encore les anciens Juifs avaient bien vu que nul ne peut voir Dieu sans mourir.
Le détachement de la mort est préfiguré dans celui qu'impose la prière. Il faut abandonner les biens extérieurs, les amis, les êtres les plus chers; et puis le corps lui-même s'obscurcit, se refroidit, on abandonne son corps; l'âme elle - même est livrée à l'inconnu, elle est précipitée de tout son haut dans l'abîme vertigineux de l'au-delà: nous appelons cela mourir.
Je crois que c'est aussi prier et que, dans la prière, il faut se résoudre à faire tous ces abandons volontairement, en détournant notre affection de tous ces objets, comme en mourant on le fait par force. Si les saints d'ailleurs meurent si facilement, c'est qu'en priant de tout leur coeur et depuis longtemps, ils ont pris pour ainsi dire l'habitude de mourir.
RP Bruckberger op +