homélie pour la fête Dieu - dom Jean Pateau père abbé de Fontgombault

Publié le 3 Juin 2021

 

 

 

 

 

 

+ FÊTE-DIEU 

Homélie du Très Révérend Père Dom Jean PATEAU Abbé de Notre-Dame de Fontgombault 

(Fontgombault, le 3 juin 2021) 

 

 

Chers Frères et Sœurs, Mes très chers Fils,

 

 Au soir du Jeudi-saint, l’Église a commémoré l’institution de l’Eucharistie dans le cours plus large des événements du Triduum Pascal : institution, mort et résurrection du Seigneur. Aujourd’hui, à la suite des révélations particulières au XIIIe siècle de sainte Julienne, religieuse augustine du couvent léproserie du Mont Cornillon, elle nous invite plus particulièrement à considérer ce mystère comme lieu de la communion avec le Seigneur et de son adoration. Adolescente, Julienne était particulièrement portée vers la dévotion eucharistique. Gratifiée de fréquentes visions mystiques, elle voyait par exemple une lune rayonnante de lumière, mais incomplète, divisée par une bande noire en deux parties égales. Benoît XVI lors de l'audience générale du 17 novembre 2010 commentait : « Le Seigneur lui fit comprendre la signification de ce qui lui était apparu. La lune symbolisait la vie de l’Église sur terre, la ligne opaque représentait en revanche l’absence d’une fête liturgique, pour l’institution de laquelle il était demandé à Julienne de se prodiguer de façon efficace : c’est-à-dire une fête dans laquelle les croyants pouvaient adorer l’Eucharistie pour faire croître leur foi, avancer dans la pratique des vertus et réparer les offenses au Très Saint Sacrement. »

Julienne, accepta sa mission avec l’aide de la bienheureuse Ève de Liège, une recluse. La Fête-Dieu (ou Corpus Christi) fut introduite en Europe en 1246 dans le diocèse de Liège. Après la mort de Julienne, la bienheureuse Ève obtint l'institution de la fête pour l'Église universelle par Urbain IV en 1264. L’Eucharistie est un mystère, c’est-à-dire une vérité de foi si profonde qu’elle dépasse l’intelligence qui ne peut en comprendre tous les éléments sans toutefois se trouver en face d’un objet dont elle puisse affirmer qu’il est en contradiction avec les principes premiers qui permettent à l’homme de penser. Relevons les premières paroles de saint Paul dans l’épître de ce matin : « J’ai moi-même reçu ce qui vient du Seigneur, et je vous l’ai transmis. » (1 Co 11,23)

Ce mystère vient du Seigneur. Il ne peut nous tromper. Soulignons aussi que ces paroles, qui concernent le sacrement de l’Eucharistie, sont beaucoup plus générales. Le vrai pasteur reçoit du Seigneur et transmet. Il bénit ce qui est béni de Dieu. Le mercenaire au contraire suit ses propres intuitions. Il est à son service ou se rend esclave des idées du monde. L’apôtre poursuit alors par le récit de l’institution du sacrement et conclut : Chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. Et celui qui aura mangé le pain ou bu la coupe du Seigneur d’une manière indigne devra répondre du corps et du sang du Seigneur.

On doit donc s’examiner soi-même avant de manger de ce pain et de boire à cette coupe. Celui qui mange et qui boit, mange et boit son propre jugement s’il ne discerne pas le corps du Seigneur. (v.26-29) Manifestement, l’apôtre voulait rappeler aux Corinthiens le respect envers le corps du Seigneur.

Il explicite un peu plus loin : « Quand vous vous réunissez pour ce repas, attendez-vous les uns les autres ; si quelqu’un a faim, qu’il mange à la maison, pour que vos réunions ne vous attirent pas le jugement du Seigneur. » (v. 33-34)

En effet, ce repas n’est pas un repas comme les autres. Celui qui y participe « proclame la mort du Seigneur. »

Il fait mémoire de cette mort. La Constitution dogmatique du Concile Vatican II consacrée à l’Église, Lumen gentium enseigne : Toutes les fois que le sacrifice de la croix par lequel le Christ notre pâque a été immolé (1 Co 5,7) se célèbre sur l’autel, l’œuvre de notre Rédemption s’opère.

En même temps, par le sacrement du pain eucharistique, est représentée et réalisée l’unité des fidèles qui, dans le Christ, forment un seul corps. (cf. 1 Co 10,17) (n° 3)

Ce qu’est cette œuvre de notre Rédemption renvoie au discours du Pain de Vie rapporté par saint Jean (ch.6) et dont l’évangile de ce jour est tiré : Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement… Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui.

De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. (Jn 6, 51 ; 56-57)

La promesse faite par le Seigneur n’est pas secondaire : c’est la vie éternelle. Pour autant, elle ne suscitera pas l’engouement de tous ses interlocuteurs qui s’interrogent tant sur la personne de celui qui fait la promesse que sur ce qui est promis : Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, déclarèrent : « Cette parole est rude ! Qui peut l’entendre ? »… À partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s’en retournèrent et cessèrent de l’accompagner. Alors Jésus dit aux Douze : « Voulez-vous partir, vous aussi ? » Simon-Pierre lui répondit : « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. (Jn 6, 60 ; 66-68)

La question adressée aux disciples nous est aussi adressée. Partir, c’est prendre le sacrement de l’Eucharistie pour une chose banale. Il est si tentant de trouver d’autres maîtres... L’Eucharistie est un mystère car le sacrement rend présent le sacrifice de la Croix et en applique les fruits. Dieu sert abondamment la table. Il se donne en nourriture. Chaque miette venue de cette table comble le cœur de l’homme sans que l’homme ne l’épuise. Dieu vit en nous et nous en Dieu. Demeurons dans l’action de grâces sans nous lasser pour un tel don. Nul homme ne peut se contenter d’être simple consommateur d’un tel mystère, d’un si grand sacrement. Il doit le rayonner. Celui qui participe à la vie du Christ n’a de cesse que cette vie se communique. « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! » (Lc 12,49)

A notre juste place, par l’adoration, la prière, par le témoignage de la vie et l’évangélisation, travaillons à ce que « le pain des anges » devienne le pain des hommes, de tous les hommes.

Concluons par cette strophe empruntée à la séquence : Bon Pasteur, Pain véritable, Jésus, ayez pitié de nous : Nourrissez-nous, gardez-nous, Faites-nous voir les vrais biens dans la terre des vivants.

 

Amen, Alléluia.

Rédigé par Philippe

Publié dans #homélies

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