Toussaint 2021 - "Gaudeamus in Domino !"

Publié le 19 Octobre 2021

 

 

   

   " Riez, riez, mes enfants, quand les novices rient le diable pleure. "

bienheureux Humbert de Romans.

 

La joie est la vérité de la vie; elle est le droit, elle est la sagesse, étant donné que nous sommes dans notre voie et que nous demeurons unis à Celui qui gouverne nos destinées, qui nous aime, qui a lié notre avenir à de prodigieuses promesses et qui nous dit en toute difficulté, en toute atteinte des réalités immédiates et en toute anxiété touchant ce qui nous menace :" Ne craignez pas, petit troupeau , car il a plu à notre Père de vous donner un royaume."

   Cette joie, qui est de droit, est aussi moralement une nécessité; c'est un devoir strict, parce que, en premier lieu, elle est le témoignage de la confiance filiale que notre Père des cieux est en droit d'attendre de nous; elle est une forme de reconnaissance; elle reflète les sentiments que doivent nous inspirer la grandeur de Dieu , sa perfection, sa béatitude. Ensuite , cette joie est un état d'esprit indispensable à l'accomplissement de nos autres devoirs. 

   La joie est une force, la tristesse brise nos énergies; la joie nous épanouit, déplie notre âme, l'ouvre aux souffles d'en haut, la féconde; la tristesse nous resserre et nous ronge, nous isole et nous stérilise. La joie est donc utile à la vie morale et à la productivité, à la vie familiale et sociale, à tout ce qui dépend de notre santé spirituelle, voire de notre santé physique, et la tristesse leur est nuisible. 

   " Un saint triste, disait saint François de Sales, est un triste saint": on peut en dire autant de chaque homme. Si l'on ne veut pas sombrer jusqu'au dessous de soi-même, se voir débilité et paralysé en face des dangers, en face des devoirs, il faut goûter au tonique de la joie, il faut garder au coeur l'impression d'une douce fête, celle qu'évoque le saint Livre en disant que le coeur du juste est un festin perpétuel. 

... 

  Il n'y a qu'une chose qui puisse nous arracher la joie, c'est cela même que nous poursuivons si souvent comme sa cause: le mal. Le mal qui nous sépare de Dieu, qui s'oppose au règne de Dieu et par suite, puisque notre salut en vient, à notre propre règne sur nous-mêmes, à notre épanouissement supérieur, à notre vraie vie, haute et durable: tel est l'ennemi de la joie. 

" Réjouissez-vous, réjouissez-vous dans le Seigneur sans cesse, je vous le dis encore, réjouissez-vous. "

   Cette joie a des degrés; elle s'approfondit à mesure que nous pénétrons, que nous installons plus en avant dans la vie nouvelle. L'homme ancien ne cède que peu à peu; l'homme nouveau est comme le papillon qui dégage péniblement ses ailes des enveloppes de la nymphe et de la chrysalide.

   ....

   Quand je crois, je ne puis manquer de goûter la sérénité d'une pensée qui se rassure, qui s'équilibre au dedans et qu'aucun mystère du dehors, aucune obscurité de la vie ne pourra plus surprendre. 

   Quand j'espère, j'ai en moi mon objet d'espérance et mon secours, comme on a un héritage, après que par une annonce authentique on a été saisi de l'heureux gain. 

   Mais surtout quand j'ai la charité, quand j'aime Dieu et mes frères en Dieu, j'ai la source de joie toute intime et toute vive. J'aime Dieu, et il est la perfection pleine; j'aime Dieu et Dieu m'aime au point de ne songer qu'à me consoler; j'aime Dieu, et ce qu'il me défend, ce qu'il me déconseille me devient de ce fait odieux et comme impossible, ce qu'il me demande, me suggère ou m'impose, quelque dur qu'il soit, devient une douceur, car " là où l'on aime, dit saint Augustin, il n'y a plus de peine, ou s'il y a de la peine, on aime la peine. "

    L'amour, qui est la clef de tout, est donc spécialement de cette vertu de joie qui est aussi une promesse et une récompense. En m'attachant au Dieu de toute vie, l'amour me le donne comme une possession anticipée, qu'il n'y aura plus qu'à déployer pour que l'allégresse éclate. 

   L'amour trouve tout en tout, parce qu'il trouve en Dieu tout et qu'à rien il ne s'attache sans que Dieu y soit inclus comme motif et comme bien suprême. Il est donc satisfait et joyeux de tout, même de ce qui ferait sa peine. Il ne sent plus de fardeau, ne s'éloigne d'aucune tâche, ne s'excuse sur aucune faiblesse, ne se trouble d'aucun changement, ne redoute aucun insuccès; il se croit tout possible et réussit toujours à la fin, car il ne veut que ce que veut l'amour, son amour divin, cet allié de la toute-puissance. 

   Qu'il me sera donc facile, mon Dieu, d'être en joie! Il suffit de vous aimer ; il suffit de cette chose en elle-même si simple, si obligée de toute façon et si délectable. Vous aimer, et par amour rester dans vos commandements, c'est là tout. A cette seule condition, tout est à mon service, parce que tout est au vôtre et que l'amour communique ses biens. Ma joie ne dépend d'aucun hasard, d'un évènement du dehors ou du dedans, sauf ceci que je vous sois fidèle, car en vous elle se tient, vous seul en êtes la source, et cette source, c'est l'Amour qui la fait couler. 

   Que je vous aime donc, mon Dieu, et que la joie brille en moi, que beaucoup d'autres vous aiment et que la joie embrase tous ces anciens ou nouveaux serviteurs.

   Flamme au milieu de nos cendres, lumière dans notre nuit, sublimité paisible et féconde au cours de nos agitations et de nos tourments, faites de la joie chrétienne la consolation de cette heure grave, de ce lendemain de deuil et de cette aurore d'un avenir que nous ne discernons pas.

Sertillanges. 

 

Rédigé par Philippe

Publié dans #spiritualité

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