conférence de carême: la Transfiguration. (2)

Publié le 27 Février 2010

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Au reste, cette contemplation de la glorieuse humanité de JésusChrist appartient à la gloire accidentelle des bienheureux.

 

Ainsi l'appellent les théologiens. Elle est bien inférieure à la gloire essentielle qui consiste dans la pleine vision de la beauté divine. Car autant le Créateur surpasse la créature, autant la gloire du Créateur est supérieure à toute autre gloire. Seul il connaît l'immensité de cette gloire, celui qui l'a préparée à ses élus. « Nul que vous, ô mon Dieu, dit Isaïe, n'a vu ce que vous avez préparé à ceux qui espèrent en vous. » Oculus non vidit, Deus, absque te, quae prœparasti expectantibus te. Isa. LXIV, 4t. Ainsi, quand tous les anges en parleraient, ils ne pourraient en expliquer, ni la dignité, ni la grandeur. Nous devons à cette souveraine et immense bonté de Dieu un don ineffable comme son auteur. L'esprit humain a beau s'évertuer dans ses conceptions, jamais il ne saisira la moindre partie de ce don. Voilà pourquoi, en l'évaluant, nous ressemblons à ceux qui contemplent et admirent le tableau, non encore achevé, d'un artiste éminent, et qui le trouvent d'une perfection accomplie ; mais le peintre, qui connaît son art, sait combien cette perfection, admirée par des ignorants, est éloignée de celle qui brillera, quand il aura mis la dernière main à son ouvrage. Ainsi nous devons nous persuader que tout ce que nous disons, ou pensons de la félicité éternelle, est infiniment au-dessous de la réalité. Aussi quelques-uns font dériver caelum, le ciel, de caelo, je cache, parce qu'en lui sont contenus des biens et des délices tout à fait inconnus à l'intelligence humaine.

 

Tout ce que nous pouvons en dire se résume en deux mots : c'est qu'il nous est donné de pouvoir être heureux de cette même ineffable félicité dont jouit le Créateur. Sa béatitude consiste à se voir, à jouir de sa beauté infinie. Par son bienfait, nous vermisseaux, nous aurons en partage la même felicité, parce que nous le verrons tel qu'il est, III Joan. III, 2, et que nous jouirons de son immense beauté. Voir cette beauté infinie n'appartient qu'à la nature divine, tellement que, selon Aristote, l'intelligence divine ne peut penser autre chose. Cet objet, comme il l'appelle, est approprié et adéquat à la hauteur de l'intelligence divine. Car, poursuit Aristote, l'esprit divin se manquerait à lui-même, s'il abaissait sa pensée dans les régions inférieures. Non pas qu'il ne les connaisse; il voit tout, dit saint Thomas, et voit tout parfaitement par lui-même, puisqu'en lui sont toutes les perfections.

 

C'est donc dans cette vision claire et sans nuages, qui n'appartient qu'à Dieu, et qui est l'attribut propre de la nature divine, que consiste la félicité, la béatitude de tous les saints, hommes, ou anges. Car, sous ce rapport, dit encore saint Thomas, les hommes quoiqu'inférieurs aux anges en nature, leur sont égaux en béatitude.

 

Tous les saints comprenant donc qu'ils étaient créés pour cette gloire, on ne saurait dire tout ce que pour elle ils endurèrent de travaux en cette vie, et combien ardents étaient leurs désirs d'y arriver. De là cette prière suppliante de Moïse au Seigneur : « Si j'ai trouvé grâce devant vous, montrez-moi votre visage, afin que je vous connaisse, et que je trouve gràce_devant vos yeux. » Exod. XXXIII, 13 et passim. De là saint Paul demande à être dégagé des liens du corps, pour être avec Jésus-Christ. Philip. 1, 23. De là on a dit de tous les saints, que, pendant leur séjour sur cette terre, ils avaient le désir de mourir, et la patience de vivre. Or, de ce désir causé par le bonheur céleste et par l'Esprit-Saint, on peut inférer que nous sommes appelés à cette suprême félicité. Car, si saint Thomas et les autres vrais philosophes concluent du désir naturel de l'immortalité à l'immortalité des âmes, par la raison que ce désir a été imprimé dans nos cœurs par le Créateur, qui ne fait rien en vain; nous avons raison aussi de conclure, de ce désir de tous les saints, que nous parviendrons à cette félicité divine, l'auteur de la grâce n'étant pas inférieur à l'auteur de la nature.

 

Si le désir de la nature est si efficace, le désir inspiré par la grâce divine ne le sera pas moins, puisque l'un et l'autre dérivent d'un même principe toujours également puissant.

 

On dira peut-être : Comment peut-il se faire que la faiblesse de l'intelligence humaine puisse s'élever à une telle hauteur qu'elle contemple cette nature sublime et supracéleste, non en énigme et comme dans un miroir, mais à découvert et face à face ? D'après les philosophes, pour comprendre les choses il nous faut des images; sans quoi nous ne saisissons rien. De là vient que-nous ne sommes pas en état de nous faire une idée de la substance du dernier des anges, faute d'une image pour nous la représenter. Bien plus, ce qui est autrement étonnant, nous ne pouvons même saisir la substance de notre âme, que nous avons en nous cependant, par laquelle nous vivons, nous nous mouvons, dont nous sentons toujours l'action; et cela, parce que nous n'en avons pas l'image. Comment donc notre entendement pourra-t-il jamais s'élever assez pour voir cet Esprit supérieur, dont aucune chose créée n'est en état d'exprimer la nature ? — Les théologiens répondent : Dieu lui-même, dans la céleste patrie, s'unira d'une manière ineffable à notre intelligence, il se présentera sous une forme intelligible, en sorte qu'il sera l'objet que nous verrons, et le principe en vertu duquel nous verrons. Il irradiera notre âme d'une nouvelle et glorieuse lumière, et l'élèvera au-dessus de sa puissance naturelle, afin qu'illuminée par lui, elle puisse apercevoir cet éblouissant Soleil. C'est ce qu'exprime le Prophète en ces termes : « Dans votre lumière nous verrons la lumière. » Ps. xxxv, 10. C'est aussi ce que les théologiens appellent la lumière de gloire. S'il était permis d'employer un terme de comparaison dans une si grande chose, on dirait que c'est une sorte de lunette. Comme celle-ci, mise au service d'une vue faible, lui fait apercevoir ce que l'œil lui-même ne peut saisir; de même cette lumière de gloire illuminera notre intelligence, rélèvera au-dessus de sa portée, en sorte qu'elle soit en état d'arriver jusqu'à la contemplation de la beauté divine.

 

II.

 

Voyons maintenant quelle est la conséquence de cette vision de la divine beauté. Le royal Prophète répond : « Je serai rassasié, lorsqu'aura paru votre gloire. Ps. XVI, 15. Pourquoi serai-je rassasié ? — Parce qu'en vous seul je verrai non-seulement vous, mais tout ce que peut désirer la volonté humaine, tout ce que peut concevoir entendement : je n'aurai donc rien à chercher hors de vous. — Une autre traduction est plus explicite sur cette félicité; au lieu de « Je serai rassasié quand paraîtra votre gloire, » elle porte : « La satiété des joies est avec votre visage. »

 Ce qui veut dire que, dans cette substance suréminente, sont unies et fondues d'une manière ineffable les perfections de tous les biens qui se trouvent dans toutes les choses créées, et une infinité d'autres qui sont propres à la divinité ; d'où vient cette satiété de joies, qui procède de la réunion multiple et infinie de tous les biens.

 

C'est pourquoi cette céleste béatitude est si bien figurée par la manne, présentée à nos pères dans le désert, et qui réunissait en soi toutes les saveurs, toutes les suavités, toutes les douceurs. Aussi, quand cette manne plus que céleste nous sera servie dans le resplendissant banquet, nous n'aurons rien à désirer au delà.

 

Alors cette roue vivante de nos désirs, agitée par les mouvements continus des passions, puisque nous convoitons avec une avidité insatiable tantôt ceci, tantôt cela, se reposera satisfaite dans la possession du bien suprême et universel. On n'aura plus à chercher ailleurs, et par divers ruisseaux, ce qu'on puisera purement et surabondamment dans cet océan de tous les biens. Car si, au témoignage de saint Augustin, une seule goutte, puisée au fleuve du paradis, étanche toutes les soifs du monde, que ne fera pas cette mer inépuisable de tous les biens ?

 

Maintenant, mes frères, j'ai à vous faire une question. Si les mortels poursuivent quelque bien mesquin de ce monde, richesses , honneurs, plaisirs sensuels, santé, faveur des princes, emplois publics, dignités, s'ils les poursuivent avec une ardeur si fiévreuse qu'ils ne reculent devant aucune fatigue, devant aucun péril de la mer ou de la terre, pour y parvenir ; qu'ils bravent des armées redoutables. et les piques, et le glaive, et le feu ; je vous le demande, que ne devons-nous pas faire pour acquérir ce bien suprême, qui renferme tous les biens?

 

L'esprit humain peut-il désirer quelque chose qu'il ne trouve là, et qu'il n'y trouve beaucoup plus admirable qu'il ne pensait ? Aspirez-vous à la gloire et à la louange humaine ? — « Chacun recevra de Dieu la louange qui lui est due, » I Cor. 1v, 5; louange non pas fausse et mensongère, mais vraie et solide, et non exposée à l'envie.

 Désirez-vous richesses et longue vie ? — « La longueur des jours est dans sa droite, et dans sa gauche les richesses et la gloire. » Prov. III, 16. Etes-vous ambitieux d'un trône, de dignités? — Là, les saints chantent qu'ils ont été créés par Dieu pontifes et rois, et qu'ils régneront sans fin avec lui. Etes-vous passionnés pour la science, pour les connaissances diverses? — Là, par le bienfait de l'Agneau céleste, vous trouverez ouvert le livre qui renferme la science parfaite de toutes choses. Ce qu'en cette vie nous apprenons en détail et successivement, là nous le lirons pleinement dans cette bienheureuse vision de l'essence divine. Beaucoup placent la félicité suprême dans la faveur et l'amitié des princes.

 

Y a-t-il un plus grand bonheur que d'arriver à un état où l'on est rangé parmi les enfants et les amis du Roi suprême et éternel? Enfin, tous les mortels aspirent après le repos, après la fin des travaux et des peines. Je vous le demande, où le trouver, ce repos, sinon au sein des joies des bienheureux? « Là, dit saint Cyprien, est célébré ce sabbat où tous les élus se nourrissent sans labeur de la plus douce des mannes. » Pendant six jours, les Israélites au désert la mangeaient non sans travail, après s'être répandus cà et là pour la recueillir; mais, le sixième jour , ils recueillaient une double provision pour le jour présent et pour le suivant, afin de passer dans le repos le jour du sabbat. Exod. XVI, 22, et passim.

 

Cela même arrivera spirituellement à tous les élus. Pendant les six jours de cette vie, ils se nourrissent de la manne cachée que leur envoie l'Esprit-Saint pour les consoler dans leur pérégrination et leurs travaux ; car il faut le travail pour que le mérite soit possible. Ainsi méritait l'Apôtre, quand il disait : « Plus les maux que nous souffrons pour Jésus-Christ sont grands, plus grande aussi est la consolation que nous trouvons en lui. » II Cor. 1, 5. « Au milieu de mes douleurs , dit le royal Prophète , vos consolations ont rempli de joie mon âme. » Ps. XCIII, 19. Mais dans ce sabbat, où se solennise l'éternel repos, où tous les saints se reposent de leurs fatigues, c'est, non plus le temps de travailler, mais le temps de se reposer; non le temps de chercher sa nourriture par le travail, mais de jouir sans travail des biens acquis, et acquis par un long travail.

 

Voilà, frères, la récompense proposée à ceux qui, pour Dieu, renoncent à eux-mêmes, et portent leur croix tous les jours.

 

Tout y est magnifique et désirable à tous les titres; mais ce qui en rehausse le prix, c'est ce que je vais dire, supposé que je puisse l'expliquer par la parole. Les théologiens disent que, dans cette joie de la béatitude, joie que donne la vision de la beauté divine, il n'y a pas de succession, comme il n'y a pas succession dans cette nature parfaite et suprême. Pour elle tout ce qui a été est encore; tout ce qui est sera, et sans nul changement; ce qui sera a déjà été, et est toujours présent. Le propre de l'éternité, c'est qu'elle est tout entière simultanément ; c'est qu'en elle il n'y a rien d'antérieur , rien de postérieur. La gloire des saints, qui procède de la vision béatifique, reflète à sa manière cette grandeur, cette excellence de l'éternité ; la joie qu'elle procure est sans succession ; elle se perçoit tout entière simultanément, sans accroissement ni diminution; en sorte que la joie de toute l'éternité se ressent tout entière à chaque moment.

 

Si mon langage est obscur , je vais tâcher de l'édaircir par un exemple familier. Dans les festins d'apparat où l'on présente des mets recherchés, chaque mets a une propriété , une saveur particulière. Si le festin se prolonge, les plaisirs se succèdent à travers une variété infinie de ragoûts et de friandises. Supposez maintenant, quoique cela ne puisse avoir lieu en cette vie, que le premier mets du festin, ou plutôt que la première bouchée apporte avec elle tous les plaisirs, toutes les saveurs qui doivent être goûtées pendant tout le cours du banquet. Alors ce plaisir comprendra tous les autres, et en un seul point du temps il flattera le palais autant que tous les autres mets l'auraient flatté pendant toute la durée du festin.

 

A l'aide de cette similitude grossière, et indigne de la majesté de si grandes choses, on aura une idée telle quelle de la grandeur de la joie ressentie dans la contemplation du souverain bien. Là, nulle succession de joies, mais la joie de toute l'éternité est toujours présente , nous l'avons dit, à quelque moment que ce soit.

 

A cette occasion, saint Bernard admire la bonté de la Providence divine qui, donnant à ses élus à boire dans les larmes avec mesure, les fait cependant s'abreuver sans mesure, c'est-à-dire sans succession et à satiété, aux torrents de sa volupté. La peine est bue goutte à goutte, dit-il, elle passe facilement et peu à peu ; mais alors ce sera un torrent de volupté, et un torrent qui afflue et non qui s'éloigne. Au souvenir de cette volupté, le saint docteur était si transporté, qu'il s'écriait : « Combien de fois, dans ma prière, à la pensée de cette joie, ne suis-je pas remué jusqu'au fond des entrailles, et mon visage n'est-il pas inondé de larmes ! O si cela durait, etc. » Et comme sa joie se prolongeait par cette pieuse et dévote considération, voulant retenir un ressouvenir si doux, il ajoute : « Si je t'oublie, ô Jérusalem , que ma droite soit vouée à l'oubli ; que ma langue s'attache à mon palais, si jamais je perds ton souvenir. » Ps. cxxxv1, 5. Puis le saint docteur, impatient du retard, s'écrie : a Seigneur, quand déchirerez-vous mon ciliee, pour me revêtir d'un habit de joie ? » Ps. XXIX, 12.

 

 

 

Qui donc de nous, mes frères, sera assez insensible pour ne pas s'animer, s'enflammer à la pensée d'une telle gloire ? qui ne secouera pas l'engourdissement de l'esprit ? qui ne fera passer cette préoccupation avant toutes les autres de la vie ? qui ne voudrait mourir mille fois pour un tel bonheur ? Saint Augustin n'a pas tort quand il dit : S'il nous fallait chaque jour endurer des tortures, supporter les douleurs mêmes de la géhenne pendant des siècles, afin de pouvoir contempler Jésus-Christ dans sa gloire, et être associés au nombre de ses saints, devrait-on hésiter à subir tous les maux, pour participer à un si grand bien, à une telle gloire ? Mais le Seigneur, bon et miséricordieux, ne nous demande pas un si grand sacrifice ; tout ce qu'il exige, c'est que nous n'oublions pas que nous avons été créés pour cette immense gloire c'est que, nous détournant de biens fragiles et périssables , nous portions tous nos soucis, toutes nos préoccupations, toutes nos pensées vers ce souverain bien ; ayant toujours sous les yeux ces paroles de l'Apôtre, que nous n'avons pas ici de cité permanente, mais que nous cherchons celle où nous devons habiter un jour. hebr. XIII, 1-i.

 

 

 

Conduisons-nous donc , non en citoyens et en habitants de cette terre, mais en étrangers, en voyageurs , qui ont un autre but, et qui cherchent leur patrie.

 

Tel fut l'esprit, telle la disposition de ceux qui, par le droit chemin , sont arrivés à cette patrie. C'est ce que remarque l'Apôtre, en pesant les paroles du saint patriarche Jacob. Pharaon, devant qui il avait été amené en Egypte, lui ayant demandé son âge, Jacob, qui savait que cette vie est non une vie, mais une pérégrination, répondit : Il y a cent trente ans que je suis voyageur ; le temps de mes années a été court, et n'a pas égalé celui des années du voyage de mes pères. Gen. XLVII , 8. D'où l'Apôtre conclut que ces saints patriarches se regardaient comme des étrangers, des voyageurs sur cette terre. « Car des hommes qui parlent ainsi font bien voir qu'ils cherchent leur patrie. Certes, s'ils avaient pensé à cette patrie, d'où ils étaient sortis, c'est-à-dire à la Mésopotamie, lieu de leur origine, ils avaient le temps d'y retourner. Mais maintenant ils en veulent une meilleure, la céleste patrie; aussi Dieu ne rougit point d'eux, et il veut bien être appelé leur Dieu, parce qu'il leur a préparé une cité. » Hebr. x1, 15 et 16.

 

Non , Dieu ne rougit pas d'eux, et il veut bien être appelé le Dieu de ceux qui en cette vie n'ont eu d'autre travail que de lui être agréables en tout, et d'aspirer à son héritage.

 

Tels étaient les sentiments du royal Prophète ; quoiqu'au comble de la puissance , au milieu des trésors et des biens de la royauté, il s'écrie : « Seigneur, écoutez ma prière , prêtez l'oreille à mes cris ; ne vous rendez pas sourd à la voix de mes larmes. » Ps. XXXVIII, 13. Ne gardez pas le silence, c'est-à-dire ne cessez jamais de me prêter votre appui, de me porter secours. Pourquoi ? — « Parce que je suis devant vous comme un étranger, un voyageur, comme ont été tous mes pères. » Ibid. Etant donc pauvre, étant étranger, et comptant pour rien les biens fragiles et fugitifs de la terre, j'ai toujours besoin de votre assistance, qui peut enfin, après cette pérégrination, me conduire à la patrie désirée.

 

Saint Ambroise remarque la différence qui séparait les deux voleurs, crucifiés avec le Seigneur : l'un, pensant non à la vie future, mais à la vie présente, la demandait au Sauveur en ces termes : « Si vous êtes le Christ, sauvez-vous, et sauvez-nous; » l'autre, au contraire, méprisant cette vie, et portant sur l'autre toutes ses aspirations : « Seigneur, disait-il, souvenez-vous de moi, quand vous serez dans votre royaume. »

 

Il n'ignorait pas que celui qui pouvait donner l'éternelle vie, pouvait donner la vie du temps ; mais méprisant celle-ci comme fragile et fugitive, il ne s'inquiétait que de la vie immortelle.

 

Frères, si vous examinez bien, vous trouverez cette même différence entre les justes et les méchants. Car les méchants, repoussant loin d'eux tout souci de la vie céleste, rampent sur la terre à la manière des reptiles, ne pensant pas plus à la vie future, que s'ils n'étaient pas nés, formés, rachetés pour cette vie. En effet, « ils donnent leurs noms à leurs terres. » Ps. XXVIVIII, 12.


Mais les justes, marchant dans une voie opposée, ne cherchant dans le monde que ce que demande, non la convoitise, mais le besoin, et y vivant non comme dans une demeure, mais comme dans une hôtellerie, portent toutes leurs aspirations vers l'autre vie, où ils espèrent vivre toujours; ils soupirent après elle, impatients d'y arriver, et « brûlant du désir d'être revêtus de cette maison céleste. » II Cor. V, 2.

 

 

 

Faisons cela, mes frères; portons là tous nos désirs; et foulant aux pieds toutes les choses de la terre comme viles et éphémères, ne pensons, et le jour et la nuit, qu'à cet avenir éternel ; méditons-le, quand nous dormons, quand nous veillons, quand nous mangeons , quelque chose que nous fassions ; tâchons de l'obtenir du Seigneur à force de prières et de vœux. Croyons avoir vécu utilement et heureusement, quand, morts au monde et à toutes les choses du monde, nous aurons vécu pour ce seul soin. C'est à une telle vie qu'est réservée dans le ciel la vie immortelle. Daigne nous l'accorder Celui qui aujourd'hui a daigné en montrer l'image dans sa glorieuse transfiguration.

 

 

 

Rédigé par philippe

Publié dans #spiritualité

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