histoire de fondation: nd de Randol.
Publié le 6 Septembre 2011
"Il est intéressant de voir comment un simple Routier à pu, par l’intermédiaire de son carnet de route, aider à la fondation d’un monastère bénédictin, lieu de prière et de travail selon la devise traditionnelle de l’orde de St Benoît « Ora et labora« .
Les Gorges de la Monne
Juillet 1952 : Sac au dos, une dizaine de Routier d’Amiens crapahutent à travers l’Auvergne, du Puy de Dôme au Puy de Sancy, du lac de la Cassière à celui de Chambon. Leur dernière étape les enfonce dans les pittoresques Gorges de la Monne, avant de gagner Saint Saturnin dont le château royal et surtout l’église romane font leur admiration.
Sur le carnet de route, qu’il tient chaque soir, après la veillé, l’un des Routiers note la profonde impression que lui ont fait ces Gorges de la Monne et leur débouché au pied d’un petit hameau accroché sur les flancs d’un rocher. Les maisons paysannes de vieilles pierres ne manquent pas de cachet et retiennent le regard ; les granges, bien qu’un peu délabrées, ont du caractère. Un chien couché à ses pieds, un berger est là, au fond d’un cirque de verdure, entouré de centaines de moutons auxquels il parle comme à des vieilles connaissances ; une tente de peaux de bêtes tendue entre quatre piquets de bois lui sert d’abri pour la nuit et en cas de pluie.
L’interviewer est un plaisir et il apprend aux garçons qu’il a la garde, tout l’été, de six cents bêtes, appartenant aux habitants de « Randol » : c’est le nom de ce hameau, que domine le rocher du Conquaire. Il vit de pain et de fromage, et de l’eau des excellentes sources ; il paraît le plus heureux des hommes, au milieu de ce « Cirque de Champeaux », dans une rusticité et une intimité avec la nature, bien faites pour être comprises des scouts.
Novembre 1966 : Le Père Abbé de l’antique abbaye de Fontgombault est à la recherche d’un lieu qui convienne pour y faire une fondation : les novices sont nombreux chez lui, il a dû augmenter le nombre de cellules, mais la place manque encore et il lui faut essaimer. L’évêque de Clermont l’ayant sollicité pour restaurer la vie bénédictine dans son diocèse, il s’y rend et prospècte discrètement le pays.
« Si nous allions du côté des Gorges de la Monne », suggère son compagnon, ancien Routier devenu moine à Fongombault, qui se rappelle les notes qu’il avait griffonnées, qu’il a ensuite fait taper et même relier, comme il le faisait après chacun de ses camps. Précieux souvenir !
L’auto s’engage en cahotant dans la vallée. Les moines sont saisis par la beauté de cette solitude de bout du monde, par le silence, par la paix ; tout inspire le recueillement, la contemplation de la création, qui mène qu Créateur. Arrivés à l’entrée des Gorges, ils descendent de voiture : le hameau de Randol est toujours là, endormi, un peu plus délabré que quatorze année plus tôt, mais toujours aussi captivant. « C’est un site tel que l’aurait choisi St Bernard » murmure le Père Abbé. Et prenant une médaille Miraculeuse, il la jette de toute la force de son bras.
Le soir même, il apprenait que ce fond de vallée était à vendre ainsi que les bois qui l’encadraient ; que les fermiers de Randol se retiraient les uns après les autres pour aller vivre en ville et ne demandaient qu’à céder leurs petits champs ; et déjà des bienfaiteurs se proposaient de l’aider à réaliser son projet. Vraiment, c’était la Providence de Dieu qui l’avait amené en cette thébaïde.
Mai 1971 : Moins de cinq ans plus tard, l’abbaye Notre Dame de Randol se dressait exactement à l’aplomb de l’endroit où le Père Abbé avait lancé sa médaille, et les premiers moines commençaient à chanter la louange divine dans une église pointé vers le ciel, telle une tente dont le mas se termine par la Croix.
Les moines ne furent pas peu surpris de découvrir que l’humour de Dieu les avaiet amenés, grâce à un camp de Routiers, dans un domaine qui avait été sanctifié par des générations de paysans et surtout de paysannes pauvres qui priaient pour que leur hameau ne meure pas ; et qu’ils reprenaient en ces lieux des traditions séculaires – le « Trésor de Randol »- qui avait failli être interrompues par la misère de l’époque.
Puisse Notre Dame Sainte Marie, Patronne de la nouvelle abbaye, obtenir de son Fils que la prière ne s’interrompe plus d’ici la fin des temps !
Dom Jean-Louis de Robien, moine à l’abbaye Notre Dame de Randol.