homélie pour le mercredi des cendres.
Publié le 6 Mars 2014
Dimanche dernier, mes Frères, avec l’hymne à l’amour de saint Paul, nous avons parlé de la plus grande des vertus surnaturelles : la charité.
La charité qui nous est donnée par Dieu à notre baptême, ou qui nous est redonnée par la confession si par malheur nous l’avions perdue par le péché. Cette charité est la communauté de vie surnaturelle entre Dieu et nous sur cette terre : être dans son amour et sa grâce, agir pour aimer Dieu et pour aimer notre prochain en Dieu.
Si la Septuagésime, il y a trois dimanches, nous a rappelé que la vie chrétienne est comme une course dans le stade, le carême est le camp d’entraînement à la charité.
Et les trois grands volets de notre action du carême : prière − pénitence − aumône, sont les trois exercices que l’Église nous demande de pratiquer pendant le carême pour développer, fortifier, faire grandir notre amour de Dieu.
Vous avez peut-être déjà vu des salles d’entraînement sportif, des salles de musculation pour les héros du monde moderne : on y voit de véritables instruments de torture auxquels ceux qui veulent devenir des champions se soumettent volontairement afin de développer chacun des muscles qui leur serviront pour l’épreuve. Ils s’entraînent pour être prêts. Eh bien, nous voici, Mes Frères, dans notre salle d’entraînement à la charité, avec trois exercices : la prière, la pénitence, l’aumône.
La prière est peut-être le plus simple des exercices, cela demande juste du temps, de la volonté et aussi bien sûr beaucoup de persévérance. Au minimum, mettons-nous en présence de Dieu, essayons chaque jour de bien faire nos prières du matin et du soir, et notre examen de conscience qui nous préparera ainsi à une bonne confession avant Pâques. Mais c’est vraiment le minimum : il est difficile d’aimer quelqu’un qu’on ne connaît pas, ou qu’on connaît peu, il est difficile d’aimer quelqu’un à qui on ne parle pas, ou peu.
La prière est un cœur à cœur avec Dieu et celui qui aime a plaisir à parler à l’Être aimé, même si Celui-ci ne nous répond pas comme nous le souhaiterions. Alors essayons de trouver plus de temps pour prier. Notre liturgie nous propose chaque jour une messe différente dans le missel, lisons-là, prions avec la prière de l’Église, méditons ce que dit Notre-Seigneur dans son Évangile quotidien.
Et si nous voulons parfaire notre exercice, alors relisons au moins un des quatre évangiles pendant ce carême, relisons cet évangile en le priant, en le méditant, en demandant à Notre-Seigneur de nous apprendre ainsi marcher sur ses traces, à suivre son exemple, demandons Lui la grâce de Lui être fidèle et de monter avec Lui jusqu’au Calvaire, que notre prière nous aide à aimer Dieu jusqu’à la Croix.
La pénitence… vous allez me dire, quel rapport avec la charité ? L’ancien droit canon exigeait le jeûne tous les jours de carême : était-ce un acte de charité ? Oui !
Car la pénitence n’est pas pour nous, elle est pour Dieu : si nous faisons pénitence, c’est parce que nous voulons aimer Dieu encore plus et Lui montrer que nous avons le regret de toutes les fautes que nous avons commises contre son amour. En faisant pénitence, nous nettoyons notre âme pour laisser plus de place au Seigneur.
Et la pénitence, en nous vidant des choses terrestres, non seulement nous ouvre pour laisser entrer le Seigneur en nous, mais aussi elle nous associe à son œuvre de rédemption. Chaque sacrifice que nous offrons dans la Charité est comme un soulagement que nous apportons au poids de la Croix sur les épaules de Notre-Seigneur.
La pénitence nous est donc utile, à nous-mêmes, − car rien ne sert de vouloir sauver notre prochain, si nous ne voulons pas nous sauver nous-mêmes −, mais la pénitence est aussi utile quand nous l’offrons pour tous ceux que Dieu nous demande d’aimer.
L’aumône… comme la charité, ce mot a aujourd’hui un sens péjoratif. Faire l’aumône, c’est bien plus qu’ouvrir un peu plus son porte-monnaie aux pauvres pendant le carême. Tous, nous avons ce devoir pressant d’aider ceux qui ont moins que nous, et tous, j’en suis sûr, nous le ferons. Mais à l’aumône sonnante et trébuchante, essayons d’ajouter une aumône qui nous coûte beaucoup plus, spirituellement parlant, car on peut toujours ouvrir son porte-monnaie sans que ce soit véritablement un acte de charité, nous l’avons vu dimanche. Pour paraphraser l’expression « faire l’aumône d’un sourire », faisons l’aumône de notre charité-même par la patience et le support mutuel comme dit saint Paul.
Quand nous ouvrons notre porte-monnaie pour donner quelques pièces à un mendiant, celui-ci voit que nous avons de l’argent. Alors il faudrait, qu’en agissant avec bonté, avec sourire, avec humilité et gentillesse, avec ceux que nous côtoyons tous les jours, et parfois difficilement, ces personnes que peut-être au fond de nous-mêmes nous n’aimons pas tellement, il faudrait que ces personnes voient que nous avons en nous la charité de Dieu et que nous voudrions partager cette charité avec eux.
Aimer Dieu, et en Dieu, aimer notre prochain : voilà l’état de vie dans lequel Dieu nous met à notre baptême en nous donnant la vertu de charité. La seule chose que nous emporterons de cette terre, Mes Frères, vous le savez, c’est notre charité : c’est en la pratiquant, en la fortifiant que nous la faisons grandir et elle sera notre seul trésor au ciel quand nous serons face à Dieu. Le commandement de Notre-Seigneur dans l’évangile d’aujourd’hui est clair : amassez-vous un trésor dans le ciel ; c’est à dire faites grandir votre charité ici-bas.
Quarante jours c’est peu, Mes Frères, toujours trop peu, ce n’est rien à côté de la montée au calvaire de Notre-Seigneur. Mais quarante jours d’un bon carême, d’un grand et saint carême, cela peut être dur !
Alors au pied de l’autel de la Croix, commençons déjà nos exercices en priant le Seigneur de nous donner la force et la grâce, prions-Le : que par la prière, la pénitence, l’aumône, notre charité soit encore plus grande le Vendredi saint, quand nous serons sur le calvaire avec Lui.
Aux pieds de l’amour de Dieu crucifié pour nous, que notre charité soit alors bien plus grande et plus forte qu’elle ne l’est aujourd’hui !
Chapellenie Bhx Charles de Lorraine - Nancy