papabili: le chemin de croix d'un cardinal.

Publié le 9 Mars 2013

 

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C'est justement la grande «capacité d'écoute» du cardinal Ouellet qui a d'abord frappé Jasmin Lemieux-Lefebvre, directeur des communications au diocèse de Québec.

 

Il a eu Mgr Ouellet pour «patron» d'octobre 2009 jusqu'à son départ l'été suivant. Il a connu un homme plus «nuancé» que l'image publique qu'il projetait.

 

«Il ne recherchait pas la confrontation... Ça le peinait d'être interprété comme directif alors qu'il faisait des propositions.»

 

Un témoignage qui tranche avec les perceptions d'un homme froid, intransigeant et insensible aux valeurs des autres.

 

Mgr Ouellet tenait à ce que chacun de ses textes soit relu aussi par des femmes, rapporte M. Lemieux-Lefebvre. Il a senti que, dans tous ses discours, il y avait «un moment avec des trémolos».

 

En public, Mgr Ouellet préférait lire ses textes plutôt qu'improviser, de crainte de se laisser emporter par l'émotion, explique André Belzile.

 

«Il a beaucoup appris à Québec», croit son ancien directeur des communications. Il n'était «pas une personne figée».

 

«Il y a des choses qu'il referait autrement.» S'il devient pape, il ne sera «pas pareil à ce qu'il a été à Québec».

 

***

 

Un conservateur aux idées fortes et de droite aurait normalement dû avoir beaucoup de succès à Québec.

 

Plusieurs se sont d'ailleurs reconnus en lui. Enfin, un évêque qui n'a pas peur de s'affirmer, qui ne craint pas la controverse et ne s'agenouille pas devant les pouvoirs publics.

 

Pour une majorité, y compris les prêtres et les autres évêques du Québec, le décalage était trop grand. «Le clergé ne se sentait pas apprécié ni aimé», a constaté Gilles Routhier, de l'Université Laval.

 

Les évêques ne l'ont jamais élu à la présidence ou la vice-présidence de leur association, rompant avec une tradition pour un évêque de Québec.

 

Les réactions, parfois violentes, de fidèles et de lecteurs de journaux ont montré combien ses prises de position dérangeaient. Le Soleil en sait quelque chose, Mgr Ouellet y ayant tenu chronique un moment.

 

Sous sa gouverne, le nombre d'adjurations, l'abandon formel du lien avec la religion catholique, fut en hausse.

 

Sa traversée de Québec fut un long chemin de croix: opposition à l'avortement même en cas de viol; opposition à la décriminalisation de l'euthanasie; opposition aux cours d'éthique et de culture religieuse à l'école et aux classes le dimanche; abandon des cérémonies d'absolution collectives pour revenir aux confessions individuelles; bataille pour dépouiller le Collège François-de-Laval de son nom de Petit Séminaire; appui tacite à la guerre en Afghanistan; opposition au mariage de conjoints de même sexe; timidité sur la place des femmes dans l'Église, etc.

 

Même sa demande publique de pardon pour les erreurs de l'Église a fini par se retourner contre lui. Pourquoi s'être limité aux erreurs d'avant 1960? Et pour ne pas avoir consulté et informé ses pairs avant de prendre la parole?

 

Ces controverses auront souvent empêché de voir ou de retenir ses réussites.

 

Le Congrès eucharistique de 2008, réussi malgré l'absence du pape.

 

Son engagement auprès des nouveaux arrivants à Québec, notamment à travers une fondation qui porte son nom et qui a survécu à son départ.

 

***

 

J'ai réécouté la conférence de presse du 30 juin 2010 où Mgr Ouellet a commenté son départ pour Rome après sept ans et demi à Québec

 

J'en ai retenu trois réponses à des questions de journalistes.

 

Ses meilleurs et pires souvenirs à Québec? Après une longue réponse, une autocritique : «J'ai essayé de donner un certain exemple. Je n'ai pas été parfait. J'espère que d'autres suivront.»

 

Quelles qualités faudra-t-il à votre successeur? Sa réponse a provoqué l'hilarité : «Avoir la foi.»

 

Petit, aviez-vous rêvé d'un poste important à Rome; qui sait, devenir pape?

 

«Ce n'était pas mon rêve. Mon rêve quand j'étais petit était d'être un missionnaire.»

 

Un long silence suivra. Mgr Ouellet lutte pour retenir ses émotions. «Je ne pense pas que je vais devenir le pape un jour», ajoutera-t-il.

 

Un an plus tard, jour pour jour, devant des journalistes de Québec rencontrés à Rome, il fera cette confession avec un brin d'humour.

 

Devenir pape? «Ce serait un cauchemar... C'est une très grosse responsabilité. Personne ne fait campagne pour ça.»

 

On aura noté qu'il a dit cauchemar. Pas enfer.

 

 

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Rédigé par philippe

Publié dans #spiritualité

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