"Ne redoute pas de descendre dans ta profondeur, te dit Augustin. Rentre en toi-même et va vers Celui qui t'a fait. Imite le jeune fils dont parle l'Évangile ; ce fils, c'est peut-être toi (Sermon 330). En retrouvant le chemin de ton coeur, tu commences à te voir tel que tu es à présent et à pressentir ce que tu devrais être.
Le coeur de l'homme, quel champ de bataille ! Chaque jour dans notre coeur c'est le combat ; seul dans son coeur, l'homme doit lutter contre une foule (Ps 99, 11), et il est rare qu'il en sorte indemne, sans blessures... Qui ne se reconnaîtrait ? Cet homme, nous dit Augustin, c'est peut-être toi, mais oui, c'est toi, c'est lui, c'est moi... (Sermon 154, 2).
C'est l'Esprit de Dieu qui combat en toi contre toi, contre ce qu'il y a en toi d'opposé à toi-même. Tu n'as pas voulu te tourner vers le Seigneur, tu es tombé et tu t'es brisé comme un vase qui s'échappe de la main et qui se brise en tombant à terre. Or, c'est parce que tu t'es ainsi brisé que tu es ennemi de toi-même, opposé à toi-même... (Sermon128, 9).
Comme un vol de moucherons, que de désirs, que de joies au rabais, que d'inquiétudes futiles viennent te harceler quotidiennement ! On les chasse, ils reviennent, et il est bien difficile de s'en débarrasser (Sermon 8, 4). Ils détournent cette part de ton désir qui devrait aller vers Dieu. Faut-il céder au découragement ? Renoncer à la prière ?
Ne désespère pas trop vite de toi-même, te dit Augustin : Personne ne fuit Dieu sagement qu'en fuyant vers lui ; de sa sévérité vers sa bonté (Sermon 351, 12). Seul l'Artisan qui t'a créé, peut te recréer. Seul Dieu peut mener à Dieu. Il réclame et toi sa ressemblance.
Cette image de Dieu qu'est l'homme... s'est comme usée dans cet abîme au mouvement perpétuel de ses flots : aussi si Dieu même ne renouvelle pas et ne répare pas cette image imprimée par lui en l'homme au jour de sa création... l'âme demeure toujours dans l'abîme. Mais qu'elle crie de cet abîme... celui qui crie du fond de l'abîme, en émerge et en sort ; ses cris l'empêchent de s'enfoncer plus profondément. (Ps 129, 1).
Y consentir, c'est déjà prier."
Augustin d'Hippone