Homélie de Mgr Ch. Dufour – Veillée à la cathédrale Saint-Sauveur en communion avec les chrétiens d’Orient – 6 mars 2015

Publié le 10 Mars 2015

Homélie de Mgr Ch. Dufour – Veillée à la cathédrale Saint-Sauveur en communion avec les chrétiens d’Orient – 6 mars 2015

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Ecoutez la parole du Christ et laissez-vous transformer par elle. Elle est tranchante cette parole, elle tranche en nous le mal, elle donne la force dans la tentation. Laissez vivre en vous cette parole. Ayez le mal en horreur, ne le laissez pas faire son chemin en vous. L’appel du carême vous y invite. Laissez vivre en vous l’amour et le pardon, comme un ferment.


mgr Ch Dufour.

« On vous a dit : ‘Tu aimeras ton prochain, et haïras ton ennemi’. Et moi je vous dis : ‘Aimez vos ennemis’ » (Matthieu 5,43-44). Telles sont les paroles du Christ que nous avons choisies pour conduire notre prière et notre marche de soutien à nos frères et sœurs chrétiens persécutés. Et l’apôtre Paul avait écrit aux chrétiens d’Ephèse : « Le Christ a détruit le mur de la haine… Par le moyen de la croix, il a tué la haine » (Eph 2,14-16). Il a tué la haine…


Mais la haine n’est pas morte, et de nombreux chrétiens en paient le prix. Ils sont devenus la cible des terroristes. Pas seulement les chrétiens. Nous avons vu que nos frères juifs étaient eux aussi visés. Mais aussi des musulmans, croyants honnêtes, qui vivent en paix avec les chrétiens et, nous en avons le témoignage, les soutiennent lorsqu’ils sont attaqués.


Le Christ avait prévenu ses disciples : « Vous serez persécutés ». Et il a dit aussi : « Priez pour ceux qui vous persécutent ». Nous ne pouvons pas laisser la haine naître en nos cœurs. La colère, oui. La révolte, oui. Les psaumes de la Bible sont remplis de ce cri de révolte contre le mal. Mais la haine, jamais. « Priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux » dit encore notre Maître. Nous sommes fils du Père, nés de l’Amour ; nous avons été plongés dans le cœur du Christ, devenus enfants de Dieu par le baptême. Nous ne pouvons pas laisser la haine faire en nous ses ravages.


Frères et sœurs, c’est pour crier vers Dieu que nous sommes ici ce soir. Le 11 janvier dernier, le peuple français s’était mobilisé pour dire non à la violence meurtrière qui avait tué des journalistes et des juifs. La haine tue encore. Elle tue aujourd’hui des chrétiens. Ce furent 21 chrétiens coptes en Lybie, le dimanche 15 février dernier. Nous en avons été bouleversés. On pourrait ajouter aussi le Niger, l’Inde, le Pakistan, les Philippines, le Nigéria…La haine tue, une idéologie totalitaire sème la terreur. Ce fut encore le lundi 23 février, 220 chrétiens assyriens enlevés par des djihadistes dans le nord-est de la Syrie. Nous sommes bouleversés, nous pleurons. Nous avons voulu nous rassembler ce soir dans cette cathédrale. Pour quelle réponse ? Quelle réponse à ce drame ?


Ce drame que nous vivons est celui du mal, de la folie du mal qui détruit l’homme et que Dieu est venu combattre en Jésus. Quelle sera notre réponse ? Jamais la haine, encore moins la vengeance. Chrétiens, nous choisissons l’obéissance au Christ. En trois mots : la foi, la conversion, la prière.


La FOI


Mettez votre confiance dans le Christ. Il a tué la haine. Il a détruit le mur de la haine. Telle est notre foi, notre fierté d’être chrétien. Jésus, le Christ, n’a pas rendu le mal pour le mal. Lui, le Fils de Dieu, il a pris sur lui le mal pour nous en libérer.

Pendant les 40 jours de carême, nous ravivons en nous la foi que par la Croix le Christ a tué la haine. Notre instinct nous pousse à la vengeance, mais la vengeance n’est pas chrétienne. « On vous a dit ‘œil pour œil dent pour dent’, moi je vous dis ‘si l’on vous frappe sur la joue droite tendez l’autre joue’ ». J’apprends que de jeunes chrétiens veulent prendre les armes. Regardez l’exemple des chrétiens de Centrafrique, du Nigéria. Regardez l’archevêque de Bangui aux côtés de l’imam pour faire taire les armes. Regardez les chrétiens d’Orient, dans la foi ils reconstruisent leurs villages, leurs écoles, leurs églises, et nous les y aiderons.


La CONVERSION


Ecoutez la parole du Christ et laissez-vous transformer par elle. Elle est tranchante cette parole, elle tranche en nous le mal, elle donne la force dans la tentation. Laissez vivre en vous cette parole. Ayez le mal en horreur, ne le laissez pas faire son chemin en vous. L’appel du carême vous y invite. Laissez vivre en vous l’amour et le pardon, comme un ferment.


La source du mal se nomme « matérialisme » qui tue l’âme. Elle se nomme « libéralisme » qui fait de l’homme un loup pour l’homme. Elle se nomme « individualisme » qui rime avec égoïsme, génère le repli sur soi et rend difficile la relation fraternelle. La source du mal se nomme « libéralisme des mœurs » qui salit la beauté des créatures de Dieu. Elle se nomme « relativisme » qui jette un voile de ténèbres et de mensonge sur la Vérité. Résistons à ces poisons. Ayons le courage de marcher à contre-courant, dans un engagement personnel et collectif, pour bâtir la civilisation de l’amour.


La PRIERE


Nous vivons un combat spirituel. Nos armes sont la prière et le jeûne. A l’initiative d’un prêtre, un appel interreligieux à jeûner et à prier est lancé contre la violence et la division. Juifs, musulmans, bouddhistes s’associent aux chrétiens de toutes confessions. Ils nous invitent à choisir un jour entre le 7 et le 14 mars. Traditionnellement chez les chrétiens, les jours de jeûne sont le mercredi, jour de la trahison de Judas, et le vendredi, jour de la crucifixion du Christ. Réveillons la foi par le jeûne et la prière. Que les chrétiens d’Orient puissent être fiers de nous.

 

Tel est le sens de notre démarche de ce soir. Procession en silence, marche silencieuse vers notre sanctuaire aixois, Notre Dame de la Seds, en plein renouveau avec la présence des sœurs de la sainte Croix de Jérusalem. Procession de lumière. Lumière de la foi et de l’amour, dans l’espérance.

 

Avec Marie, mère de la foi, mère de l’Eglise, mère des hommes, mère du Christ, mère de Dieu. Nous confions notre prière à sa prière.

AMEN.

Textes : Ephésiens 2, 14-16 ; Matthieu 5, 43-48

 

mgr Dufour.

 

 

fin de vie.

 

Ce 10 mars 2015, le nouveau projet de loi sur la fin de vie est en débat à l’Assemblée nationale. Quoi de plus beau que de permettre aux soignants et aux familles d’accompagner plus dignement les personnes malades qui s’approchent de ce moment de la vie qu’on appelle la mort. Ce projet de loi se présente comme une révision de la loi du 22 avril 2005, dite Léonetti. Avis de « vigilance orange » sur ce projet. Voici quelques repères.

 

1-      Mourir dans la dignité, c’est avoir une fin de vie où sont apaisées les douleurs physiques et morales du malade et où demeure vivante jusqu’au dernier souffle la relation avec ses proches. Lorsque les soins thérapeutiques apparaissent inutiles ou disproportionnés, les soins palliatifs prennent le relais pour apaiser la douleur. Nous demandons d’accélérer l’accès de tous aux soins palliatifs et la formation des personnels soignants à la médecine palliative. Puisse la loi accorder un droit de chaque malade aux soins palliatifs.

 

2-      La sédation en question : la sédation est un soin palliatif (« sedare » signifie « calmer ») qui consiste à endormir le patient lorsque la douleur est devenue insupportable. Mais lorsque la sédation est « terminale » et continue, elle cache une euthanasie qui ne dit pas son nom. Sédation intermittente en phase terminale : oui. Sédation terminale comme solution finale : non.

 

3-      Tu ne tueras pas. L’interdit du meurtre est le socle de toute vie en société, l’homme n’est pas un loup pour l’homme. Le député Jean Leonetti, artisan de la loi, dit lui-même qu’il n’acceptera jamais que soit transgressé cet interdit.

 

4-      Chaque personne malade est unique, et sa situation singulière nécessite un dialogue entre le patient et le soignant, et avec ses proches. Les soins palliatifs seront adaptés à chaque personne malade de façon à garder les meilleures conditions possibles de ce dialogue.

 

Pour une réflexion plus approfondie, nous conseillons la lecture du livre de Mgr d’Ornellas : « Fin de vie, un enjeu de fraternité »Salvator, mars 2015.

 

Ce débat sur la fin de vie nous concerne tous. Je le recommande à votre prière fervente pour que l’Esprit Saint éclaire l’intelligence et le cœur de nos élus. Toute civilisation sera jugée sur la manière dont elle accompagne les personnes dans ce grand moment de la vie qu’est la mort. Vigilance orange !

 

+ Christophe DUFOUR

Archevêque d’Aix-en-Provence et Arles

 

Rédigé par Philippe

Publié dans #spiritualité

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