1er dimanche de l'Avent .
Publié le 28 Novembre 2021
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photo petit placide.
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PREMIER DIMANCHE DE L’AVENT
Homélie du Très Révérend Père Dom Jean PATEAU
Abbé de Notre-Dame de Fontgombault
(Fontgombault, le 28 novembre 2021)
Appropinquat Redemptio vestra Votre délivrance est proche (Lc 21,28)
Chers Frères et Sœurs, Mes très chers Fils,
Quel n’est pas notre étonnement en ce matin du premier dimanche de l’Avent, jour d’ouverture de l’année liturgique, d’entendre comme lecture de l’évangile, un passage tiré de la fin de l’évangile selon saint Luc ! Pourquoi l’Église ne nous propose-t-elle pas en ce jour, de méditer plutôt sur les évangiles du temps de l’attente de l’Enfant Dieu ? Pourquoi ne puise-t-elle pas aux nombreux textes de l’Ancien Testament qui annoncent un Messie ?
Le thème lui-même du passage retenu surprend. Au terme de sa vie publique, alors que la montée vers Jérusalem va se conclure par son arrestation, son jugement et sa condamnation au supplice de la Croix, Jésus annonce la ruine du Temple et la venue du Fils de l’Homme.
Un tel discours avait de quoi étonner les disciples. Ceux-ci pressentaient la résolution de plus en plus ferme des prêtres et des pharisiens de faire mourir le Seigneur... En face de cela, Jésus affirmait la ruine à venir du Temple, et par là même, la fin du sacerdoce tel qu’il était alors exercé.
A l’heure qu’il est, les disciples n’ont pas compris que la mort du Seigneur n’est qu’un passage, choisi et assumé pour témoigner qu’il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime.
Le discours du Christ n’est pas passé inaperçu. Matthieu et Marc le rapportent également. Chez saint Luc comme chez saint Marc, c’est la vue d’une pauvre veuve déposant deux piécettes dans le tronc du Trésor du Temple, ainsi que l’émerveillement des disciples devant l’éclat, la beauté et la richesse de ce lieu, qui suscitent ce discours. Chez saint Matthieu, le contexte est un peu différent. Des malédictions adressées aux scribes et aux pharisiens précèdent en effet les paroles du Seigneur :
Malheureux êtes-vous, scribes et pharisiens hypocrites, parce que vous fermez à clé le royaume des Cieux devant les hommes ; vous... n’y entrez pas, et vous ne laissez pas entrer ceux qui veulent entrer !...
Malheureux êtes-vous, scribes et pharisiens hypocrites, parce que vous parcourez la mer et la terre pour faire un seul converti, et quand c’est arrivé, vous faites de lui un homme voué à la géhenne, deux fois pire que vous !...
Malheureux êtes-vous, guides aveugles...
Malheureux êtes-vous, scribes et pharisiens hypocrites, parce que vous payez la dîme sur la menthe, le fenouil et le cumin, mais vous avez négligé ce qui est le plus important dans la Loi : la justice, la miséricorde et la fidélité.... Vous purifiez l’extérieur de la coupe et de l’assiette, mais l’intérieur est rempli de cupidité et d’intempérance !... Vous ressemblez à des sépulcres blanchis à la chaux : à l’extérieur ils ont une belle apparence, mais l’intérieur est rempli d’ossements et de toutes sortes de choses impures... (cf. Mt 23,13-36)
et Jésus de conclure :
Voici que votre temple vous est laissé : il est désert.
En effet, je vous le déclare : vous ne me verrez plus désormais jusqu’à ce que vous disiez : « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! » (Mt 23,38-39)
Au fond, si l’Église propose ces textes ce matin, c’est qu’il y a un préalable à l’attente authentique du Seigneur. En ce premier dimanche de l’Avent, l’Église invite ses enfants à disposer en eux un cœur accueillant, face au mystère qui va s’accomplir.
Au seuil de l’année liturgique, une question doit occuper notre cœur : qu’est-ce qui plaît le plus à Dieu, la pauvre veuve versant tout ce qu’elle a dans le tronc du Temple, ou ce même Temple serti d’or et de pierres précieuses ? Où ce peuple met-il sa fierté ?
La pauvre veuve donne tout ce qu’elle a. En remettant au Trésor ce qui est nécessaire à sa vie, elle offre en son cœur sa vie à Dieu. Elle est l’image du Christ qui la reconnaît comme telle. Les riches qui mettaient leur don au Trésor se bornaient à prendre sur leur superflu pour accomplir un précepte de la Loi. Leur cœur n’était pas au rendez-vous.
Aux yeux des disciples, la femme passait inaperçue. Eux, admiraient l’édifice de pierre qui n’est pourtant qu’un lieu, qu’un moyen pour conduire à Dieu. Peut-être admiraient-ils aussi les grands qui passaient devant eux. Dieu, lui, sonde les reins et les cœurs.
Ne traitons pas de manière identique les choses de Dieu et les intérêts matériels et caducs. Il est bon de nous en souvenir au seuil d’une année liturgique. Trop souvent, le temps aidant, nos repères deviennent flous, disparaissent même, le paraître ou l’avoir prennent la place de l’être, tant en nous-mêmes que dans le regard que nous portons sur le prochain.
Occasion nous est offerte aujourd’hui, de reconsidérer notre vie à la lumière du regard du Christ sur le Temple et sur ceux qui déposent leurs dons dans le Trésor. Lui donnons-nous tout, comme la misérable veuve, ou ne concédons-nous comme à regret que notre superflu ? Au fond, jusqu’où sommes-nous disponibles sur le chemin de notre conversion ?
Recherchons toujours la cohérence dans notre vie. Si nous voyons, agirons-nous ? « L’heure est déjà venue de sortir du sommeil. Car le salut est plus près de nous... La nuit est bientôt finie, le jour est tout proche. Rejetons les œuvres des ténèbres, revêtons-nous des armes de la lumière... Revêtez-vous du Seigneur Jésus-Christ ». (cf. Rm 13 11-14)
En ce matin, c’est à l’espérance que nous invite l’Église. L’espérance est l’âme de tout recommencement. Cette espérance ne se fonde pas sur n’importe quoi ou n’importe qui. Celui qui en est le fondement, en est aussi l’objet, c’est le Seigneur, comme nous l’avons chanté au début de cette cérémonie : « Vers vous j’ai élevé mon âme, mon Dieu en vous j’ai mis ma confiance. »
L’objet de notre espérance, c’est aussi un enfant. A l’approche d’une naissance, toute famille se prépare ; alors que quelques semaines nous séparent de la fête de Noël, il est temps aussi de nous préparer. Si le Christ doit revenir à la fin des temps, il doit aussi revenir dès aujourd’hui au cœur de notre vie. Comment ne pas accueillir un enfant ? Que peut-on craindre d’un enfant ? Que Dieu vienne à nous sous les traits d’un enfant, est déjà un signe de son amour.
Remarquons pour finir, que le temps de l’Avent est un temps marial. Marie, en attendant son Enfant, le porte déjà en son coeur. Avançons à sa suite. Ce qui plaît à Dieu, c’est un cœur offert, un cœur donné, un cœur qui dit « Oui » pour vivre de la vie que Dieu vient nous offrir, sa propre vie.
Amen