et verbum caro factum est.
Publié le 4 Décembre 2010
La définition de l'Incarnation.
On peut définir ce mystère: l'union singulière et admirable de la nature divine et de la nature humaine en la seule personne du Verbe, union de laquelle résulte ce terme unique et adorable qui est le Christ Jésus.
Nous l'appelons singulière, parce qu'il n'y a pas d'autre exemple dans tout l'ordre de la nature ni dans l'immense domaine de la grâce; admirable ou miraculeuse, parce qu'il a fallu pour la réaliser un amour infini et une puissance infinie.
Union des deux natures: nous devons reconnaître dans l'Incarnation deux substances complètes qui demeurent intactes, sans jamais se confondre, en sorte que Jésus-Christ possède entièrement toute la nature divine et toute la nature humaine, véritablement homme et véritablement Dieu, consubstantiel au Père selon la divinité, consubstantiel à nous selon l'humanité.
Dans l'unique personne du Verbe: le mystère consiste précisément en ce que deux substances ou deux natures complètes ne constituent qu'une seule personne. Nous voyons bien que l'âme et le corps s'épousent en un seul moi, mais ils ne sont que des substances partielles, et la personne est unique parce que la nature complète est unique aussi.
Dans l'Incarnation, au contraire, l'union est personnelle sans être essentielle, c'est-à-dire les deux substances sont et restent complètes, elles forment une seule personne, mais ne se fusionnent pas en une seule nature. Le Verbe de Dieu, sans changer, sans s'appauvrir, sans recevoir aucune perfection nouvelle supplée la personnalité humaine et s'approprie si bien toute l'humanité que celle-ci, avec toutes ses facultés et toutes ses opérations, est au Verbe, est du Verbe, mérite d'être adorée avec lui et en lui.
Pour nous faire une idée très exacte de cette intimité, nous devons la comparer avec les autres modes dont Dieu touche et s'unit la créature.
Dans la création, il touche chacun des êtres comme cause efficiente; il est continuellement penché sur eux, en contact avec eux par son opération, pour soutenir en eux l'existence et la vie. Et, puisque en Dieu l'opération est la substance même, Dieu est substantiellement présent dans toutes les créatures; mais il n'est pas uni substantiellement avec elles, parce qu'il est en elles, sans être quelque chose d'elles: présence substantielle, non pas union substantielle.
Par la grâce, il vient d'une manière toute nouvelle et dans un ordre entièrement supérieur, qui nous fait participer à son être propre, à sa vie intime; mais c'est encore à titre d'agent surnaturel.
L'habitation de la Trinité est un mode plus excellent; Dieu réside dans la créature raisonnable comme dans son temple, bien mieux il vit chez des amis comme chez lui, substantiellement présent en tant que terme de connaissance et d'amour.
Il y a bien présence substantielle,, non pas encore union substantielle, Dieu et l'âme restant toujours des personnes distinctes et gardant des opérations totalement distinctes: les oeuvres du juste, bien qu'elles puissent être appelées divines à cause de la forme divine dont elles procèdent, la grâce, et du moteur essentiellement divin qui les inspire, l'Esprit-Saint, demeurent toujours des actes de l'homme et ne deviennent jamais des opérations théandriques, c'est-à-dire le produit d'un suppôt unique qui serait Dieu et homme tout ensemble.
L'union de l'Incarnation est donc au-dessus de l'union commune de la création, de l'union spéciale de la grâce, même couronnée par l'habitation divine.
La personne du Verbe prend ainsi avec l'humanité sainte quatre sortes de contacts.
Premier contact, à titre de Créateur, avec les deux autres personnes, pour lui donner l'être,, la vie, le mouvement,, commune à toutes les créatures.
Second contact, à titre d'agent surnaturel pour produire et conserver en elle, avec le Père et le Saint-Esprit, la grâce, les dons et les vertus infuses.
Troisième contact, à titre d'ami, par l'habitation substantielle, qui est commune aux trois personnes.
Quatrième contact, propre à la personne du Verbe, l'union hypostatique; c'est même plus qu'un contact, car la nature divine et la nature humaine s'enlacent dans une étreinte si étroite que la personnalité créée devient impossible: le Verbe prend si bien à lui l'humanité qu'il la fait sienne, elle, ses propriétés et ses oeuvres, et que l'on peut dire: c'est Dieu qui s'incarne, Dieu qui naît, Dieu qui souffre, Dieu qui meurt et ressuscite selon la nature humaine!
De cette union résulte le Christ Jésus.
Notre-Seigneur, en effet, est cette personne unique qui subsiste dans la nature divine et la nature humaine unies indissolublement dans le suppôt du Verbe.
On voit par là que l'Incarnation dans son terme n'est pas autre chose que le Christ lui-même; et, comme Marie pouvait dire:
Je suis l'Immaculée Conception;
Jésus peut dire dans un sens plus plénier: Je suis l'Incarnation.
R.P. Edouard HUGON O.P
Le mystère de l'Incarnation.
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