une impératrice à l'abbaye de Solesmes
Publié le 4 Mai 2015
Entre 1899 et 1985, les moniales de Sainte-Cécile ont accueilli, à de nombreuses reprises, Zita, la nièce de l'archiduc François-Ferdinand d'Autriche, dont l'assassinat déclencha la Première Guerre mondiale.
Elle fut impératrice d'Autriche, reine de Hongrie, reine de Bohème, de Croatie et de Slovénie de 1916 à 1918. Membre de la famille des Habsbourg, elle est poussée à l'exil à partir de la fin de la Première Guerre mondiale. Zita de Bourbon-Parme (1892-1989) a, au cours de sa vie, fait plusieurs séjours à l'abbaye de Sainte-Cécile de Solesmes.
Soeur Marie-des-Neiges Jourdain, l'actuelle archiviste de l'abbaye, l'a connue. Elle se souvient de cette femme dont la « simplicité » faisait oublier son haut rang, sa vie de souffrances et d'exil. « Après la Seconde Guerre mondiale, elle avait souhaité devenir moniale. Ses enfants s'y opposaient. Le père abbé de l'époque, Dom Cozien, lui conseilla de continuer à tenir son rôle moral auprès de sa famille et de ses anciens sujets. Mais il l'autorisa à y passer deux mois de retraite par an, en clôture, ce qu'elle fit très régulièrement jusqu'à la fin de sa vie. »
Des séjours de 1899 à 1985
Ce n'est pas le hasard qui a conduit Zita à Solesmes. À l'âge de 7 ans, elle y avait déjà séjourné avec sa mère et deux de ses soeurs, pour visiter sa grand-mère, Adélaïde de Portugal, venue finir ses jours à Sainte-Cécile comme moniale. « La famille séjournait à l'hôtel Préau, aujourd'hui le Grand Hôtel. Le jour de son anniversaire, elle put passer un après-midi en clôture, privilège concédé à sa famille de sang royal. »
Ce fut le début de nombreux séjours échelonnés entre 1899 et 1985. En effet, elle revint brièvement à Sainte-Cécile pour la prise d'habit d'une de ses soeurs moniales, en 1908. L'année suivante, elle y suivit une formation de cinq mois. « À l'époque, nous accueillions parfois, en très petit nombre, des jeunes filles pour leur permettre de parfaire leur éducation humaine et spirituelle. La famille demanda à bénéficier de cette faveur pour Zita. Lors de ce séjour de 1909, elle a assisté au décès de Mère Cécile Bruyère, notre abbesse fondatrice. »
Mariée, en exil, puis veuve avec huit enfants, il fut impossible à la jeune femme de revoir Sainte-Cécile pendant près de 15 ans. « Ce n'est qu'à partir de 1925 que l'impératrice revient à Solesmes chaque année. Jusqu'en 1939 : 23 visites de durées inégales, d'un jour, de quelques jours ou de quelques semaines. En 1940, la famille impériale a dû fuir l'Europe car Hitler en voulait aux Habsbourg. Elle s'installe au Québec, puis aux États-Unis. »
En 1953, elle s'installe au Luxembourg. Zita, devenue oblate bénédictine en 1926, c'est-à-dire engagée à vivre selon l'esprit de la règle de Saint-Benoît dans sa vie quotidienne, pu reprendre le chemin de Solesmes pour des séjours de deux mois.
Procès en béatification
Elle le fit jusqu'à l'âge de 93 ans, vivant « comme une moniale, dans une parfaite discrétion, partageant son temps entre les offices, la prière personnelle, la lecture et les travaux manuels. Elle travaillait à l'atelier pour y découper les hosties. Elle étendait le linge, rendait service à la sacristie. Mais elle avait peu de contacts avec l'extérieur. Lors des récréations, elle nous livrait les nouvelles et y ajoutait une analyse perspicace. Elle était joyeuse, avait beaucoup d'humour, mais respectait profondément le silence de la vie des religieuses ».
Après son dernier séjour, la mère abbesse a continué à l'appeler régulièrement jusqu'à son décès, le 14 mars 1989. Vingt ans plus tard, son procès en béatification est ouvert dans le diocèse du Mans. Il se poursuit. Zita pourrait bientôt être béatifiée, comme son mari le fut en 2004.