Triduum Pascal
Publié le 27 Mars 2013
COLLEGE INTERNATIONAL DE CHAVAGNES EN PAILLERS VENDEE
Triduum (1962 forme extraordinaire)
Jeudi saint 20h
Vendredi saint 15h
Samedi saint 20h
On place dans le sanctuaire, près de l'autel, un vaste chandelier triangulaire, sur lequel sont disposés quinze cierges. Ces cierges, ainsi que les six de l'autel, sont en cire jaune, comme à l'Office des Défunts.
A la fin de chaque Psaume ou Cantique, on éteint successivement un des cierges du grand chandelier ; un seul, celui qui est placé à l'extrémité supérieure du triangle, reste allumé.
Pendant le Cantique Benedictus, à Laudes, les six cierges qui brûlaient sur l'autel sont pareillement éteints. Alors le Cérémoniaire prend l'unique cierge qui était demeuré allumé sur le chandelier, et il le tient appuyé sur l'autel durant le chant de l'Antienne qui se répète après le Cantique. Puis il part et va cacher ce cierge, sans l'éteindre, derrière l'autel. Il le maintient ainsi loin de tous les regards pendant la récitation du Miserere et de l'Oraison de conclusion qui suit ce Psaume. Cette Oraison étant achevée, on frappe avec bruit sur les sièges du chœur, jusqu'à ce que le cierge qui avait été caché derrière l'autel reparaisse et annonce par sa lumière toujours conservée que l'Office des Ténèbres est terminé.
Nous sommes dans les jours où la gloire du Fils de Dieu est éclipsée sous les ignominies de sa Passion.
Il était « la lumière du monde », puissant en œuvres et en paroles, accueilli naguère par les acclamations de tout un peuple ; maintenant le voilà déchu de toutes ses grandeurs, « l'homme de douleurs, un lépreux », dit Isaïe; « un ver de terre, et non un homme », dit le Roi-Prophète ; « un sujet de scandale pour ses disciples », dit-il lui-même. Chacun s'éloigne de lui : Pierre même nie l'avoir connu. Cet abandon, cette défection presque générale sont figurés par l'extinction successive des cierges sur le chandelier triangulaire, même jusque sur l'autel. Cependant la lumière méconnue de notre Christ n'est pas éteinte, quoiqu'elle ne lance plus ses feux, et que les ombres se soient épaissies autour d'elle. On pose un moment le cierge mystérieux sur l'autel. Il est là comme le Rédempteur sur le Calvaire, où il souffre et meurt.
Pour exprimer la sépulture de Jésus, on cache le cierge derrière l'autel ; sa lumière ne parait plus. Alors un bruit confus se fait entendre dans le sanctuaire, que l'absence de ce dernier flambeau a plongé dans l'obscurité.
Ce bruit, joint aux ténèbres, exprime les convulsions de la nature, au moment où le Sauveur ayant expiré sur la croix, la terre trembla, les rochers se fendirent, les sépulcres furent ouverts.
Mais tout à coup le cierge reparaît sans avoir rien perdu de sa lumière ; le bruit cesse, et chacun rend hommage au vainqueur de la mort.
Puissent donc se convertir et mériter d'être exercés avec nous ceux qui maintenant nous exercent!
Mais pendant qu'ils nous sont ainsi à charge, gardons-nous de les haïr, parce que nous ne savons pas si le méchant persévérera jusqu'à la fin dans sa malice. Il arrive souvent qu'en pensant haïr votre ennemi, c'est votre frère que vous haïssez, sans le savoir. Il n'y a que le diable et ses anges que nous sachions, par les saintes Ecritures, être présentement dans les flammes éternelles. Il n'y a qu'eux dont nous ne pouvons espérer de changement, eux contre lesquels nous avons à soutenir ce combat invisible, auquel l'Apôtre nous prépare, lorsqu'il dit : Nous n'avons pas à lutter contre la chair et le sang, c'est-à-dire contre les hommes que vous voyez, mais contre les principautés et les puissances, contre les princes de ce monde de ténèbres. Afin que nous ne crussions pas que les démons soient les maîtres du ciel et de la terre, quand il dit : Les princes de ce monde, il ajoute: de ce monde de ténèbres.
Ainsi, par ce monde, il entend les amateurs du monde ; par ce monde, il entend les impies et les méchants ; par ce monde, il entend celui dont l'Evangile parle quand il dit : Et le monde ne l’a pas connu.
iN CENA DOMINI
Sainte fête à tout le sacerdoce, et à tous nos moines prêtres .
en union de prières avec notre évêque, notre Père Abbé, et avec toute la sainte Eglise.
ouf ce carême se termine !
J'ai ardemment désiré manger cette Pâque avec vous avant de souffrir ! » (Lc 22, 15).
Par ces mots, Jésus a ouvert la célébration de son dernier banquet et de l'institution de la sainte Eucharistie. Jésus est allé au devant de cette heure, en la désirant. Au fond de lui-même, il a attendu ce moment où il se donnerait lui-même aux siens sous les espèces du pain et du vin. Il a attendu ce moment qui aurait dû être en quelque sorte les véritables noces messianiques : la transformation des dons de cette terre et le fait de devenir un avec les siens, pour les transformer et inaugurer ainsi la transformation du monde.
Dans le désir de Jésus, nous pouvons reconnaître le désir de Dieu lui-même - son amour pour les hommes, pour sa création, un amour en attente.
L'amour qui attend le moment de l'union, l'amour qui veut attirer les hommes à soi, pour ainsi réaliser entièrement le désir de la création elle-même : en effet, celle-ci est tendue vers la manifestation des fils de Dieu (cf. Rm 8, 19).
Jésus nous désire, il nous attend. Et nous, le désirons-nous vraiment ? Nous sentons-nous poussés intérieurement à le rencontrer ? Désirons-nous ardemment sa proximité, devenir un avec lui, don qu'il nous fait dans la sainte Eucharistie ? Ou bien sommes-nous indifférents, distraits, remplis d'autres choses ?
D'après les paraboles de Jésus sur les banquets, nous savons qu'il connaît la réalité des places restées vides, la réponse négative, le désintérêt pour lui et pour sa proximité. Les places vides au banquet nuptial du Seigneur, avec ou sans excuses, sont pour nous, depuis longtemps désormais, non pas une parabole, mais une réalité présente, précisément dans ces pays auxquels il avait manifesté sa proximité particulière.
Jésus savait aussi que des invités seraient venus, oui, mais sans être revêtus de l'habit nuptial - sans la joie de sa proximité, suivant seulement une habitude, et avec une tout autre orientation de leur vie.
Saint Grégoire le Grand, dans une de ses homélies, se demandait : quel genre de personnes sont celles qui viennent sans habit nuptial ? En quoi consiste cet habit et comment l'acquiert-on ? Sa réponse est : ceux qui ont été appelés et viennent ont en quelque sorte la foi.
C'est la foi qui leur ouvre la porte. Mais il leur manque l'habit nuptial de l'amour. Celui qui ne vit pas la foi en tant qu'amour n'est pas préparé pour les noces et il est jeté dehors.
La communion eucharistique requiert la foi, mais la foi requiert l'amour, autrement elle est morte aussi comme foi.
À travers les quatre Évangiles, nous savons que le dernier banquet de Jésus, avant sa Passion, a été aussi un lieu d'annonce.
Jésus a proposé encore une fois avec insistance les éléments fondamentaux de son message. Parole et Sacrement, message et don sont inséparablement unis. Cependant, durant son dernier banquet, Jésus a surtout prié. Matthieu, Marc et Luc utilisent deux mots pour décrire la prière de Jésus au moment central de la Cène : « eucharistesas » et « eulogesas » - « remercier » et « bénir ». Le mouvement ascendant du remerciement et celui descendant de la bénédiction vont ensemble.
Les paroles de la transsubstantiation font partie de cette prière de Jésus. Ce sont des paroles de prière. Jésus transforme sa Passion en prière, en offrande au Père pour les hommes. Cette transformation de sa souffrance en amour possède une force transformante pour les dons dans lesquels, à présent, il se donne lui-même.
Il nous les donne afin que nous-mêmes et le monde soyons transformés. Le but véritable et dernier de la transformation eucharistique c'est notre transformation elle-même dans la communion avec le Christ.
L'Eucharistie vise l'homme nouveau, le monde nouveau tel qu'il peut naître uniquement à partir de Dieu à travers l'œuvre du Serviteur de Dieu.
Grâce à Luc et surtout à Jean, nous savons que Jésus dans sa prière durant la Dernière Cène a aussi adressé des suppliques au Père - suppliques qui, en même temps, contiennent des appels à ses disciples d'alors et de tout temps. En cette heure, je voudrais choisir uniquement une supplique que, selon Jean, Jésus a répétée quatre fois au cours de sa Prière sacerdotale. Combien a-t-elle dû le préoccuper en son for intérieur ! Elle reste constamment sa prière au Père pour nous : c'est la prière pour l'unité.
Jésus dit explicitement que cette supplique n'est pas valable seulement pour les disciples présents à ce moment-là, mais qu'elle concerne tous ceux qui croiront en lui (cf. Jn 17, 20). Elle demande que tous soient un « comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, afin que le monde croie » (Jn 17, 21).
L'unité des chrétiens ne peut se réaliser que si les chrétiens sont intimement unis à lui, à Jésus. Foi et amour pour Jésus, foi dans son être un avec le Père et ouverture à l'unité avec lui sont essentiels.
Cette unité n'est donc pas seulement quelque chose d'intérieur, de mystique. Elle doit devenir visible, visible au point de constituer pour le monde la preuve que Jésus a été envoyé en mission par le Père. C'est pour cela que cette supplique a un sens eucharistique caché que Paul a clairement mis en évidence dans la Première Lettre aux Corinthiens : « Le pain que nous rompons, n'est-il pas communion au corps du Christ ? Puisqu'il y a un seul pain, à plusieurs nous ne sommes qu'un corps, car tous nous participons à ce pain unique. » (1 Co 10, 16s).
Avec l'Eucharistie naît l'Église.
Nous tous nous mangeons le même pain, nous recevons le même corps du Seigneur, ce qui signifie qu'Il ouvre chacun de nous, au-delà de lui-même. Il nous rend tous un.
L'Eucharistie est le mystère de la proximité et de la communion intimes de chacun avec le Seigneur. Et, en même temps, elle est l'union visible de tous. L'Eucharistie est Sacrement de l'unité. Elle parvient jusque dans le mystère trinitaire, et elle crée ainsi, en même temps, l'unité visible.
Disons-le encore une fois : elle est la rencontre très personnelle avec le Seigneur et, toutefois, elle n'est jamais seulement un acte individuel de dévotion. Nous la célébrons nécessairement tous ensemble. Dans chaque communauté, le Seigneur est présent de manière totale. Mais il est un seul dans toutes les communautés. C'est pourquoi les paroles : « Una cum Papa nostro et cum Episcopo nostro » font nécessairement partie de la prière eucharistique de l'Église. Ce n'est pas un ajout extérieur à ce qui se produit intérieurement, mais une expression nécessaire de la réalité eucharistique elle-même. Et nous mentionnons le Pape et l'Évêque par leur nom : l'unité est tout-à-fait concrète, elle porte des noms. Ainsi l'unité devient visible, elle devient signe pour le monde et elle établit pour nous-mêmes un critère concret.
Saint Luc a conservé pour nous un élément concret de la prière de Jésus pour l'unité : « Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment ; mais moi j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères » (Lc 22, 31s). Aujourd'hui nous constatons de nouveau avec douleur qu'il a été concédé à Satan de cribler les disciples, de manière visible, face au monde entier. Et nous savons que Jésus prie pour la foi de Pierre et de ses successeurs. Nous savons que Pierre qui, à travers les eaux agitées de l'histoire va à la rencontre du Seigneur et risque de couler, est toujours à nouveau soutenu par la main du Seigneur et guidé sur les eaux. Mais après suit une annonce et une tâche. « Toi donc, quand tu seras revenu... » : Tous les êtres humains, excepté Marie, ont continuellement besoin de conversion.
Jésus prédit à Pierre sa chute et sa conversion.
De quoi Pierre a-t-il dû se convertir ? Au début, lors de son appel, effrayé par le pouvoir divin du Seigneur et par sa propre misère, Pierre avait dit : « Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur ! » (Lc 5, 8). À la lumière du Seigneur, il reconnaît son imperfection.
C'est précisément ainsi, dans l'humilité de celui qui se sait pécheur, qu'il est appelé. Il doit toujours retrouver à nouveau cette humilité. Près de Césarée de Philippe, Pierre n'avait pas voulu accepter que Jésus ait à souffrir et à être crucifié. Cela n'était pas conciliable avec l'image qu'il se faisait de Dieu et du Messie. Au Cénacle, il n'a pas voulu accepter que Jésus lui lave les pieds : cela n'allait pas avec son idée de la dignité du Maître. Au Jardin des Oliviers, il a frappé de son glaive. Il voulait démontrer son courage. Cependant, devant la servante, il a affirmé ne pas connaître Jésus. À ce moment-là, cela ne lui semblait qu'un petit mensonge, pour pouvoir rester près de Jésus. Son héroïsme s'est effondré à cause d'un jeu mesquin pour une place au centre des évènements.
Nous tous nous devons toujours à nouveau apprendre à accepter Dieu et Jésus Christ tel qu'il est, et non tel que nous voudrions qu'il soit.
Nous aussi nous avons du mal à accepter qu'il se soit lié aux limites de son Église et de ses ministres. Nous non plus nous ne voulons pas accepter qu'il soit sans pouvoir en ce monde. Nous aussi nous nous cachons derrière des prétextes, lorsque notre appartenance au Christ devient trop coûteuse et trop dangereuse.
Nous tous nous avons besoin de conversion pour accueillir Jésus dans son être-Dieu et son être-Homme. Nous avons besoin de l'humilité du disciple qui observe la volonté du Maître. En cette heure, nous voulons le prier de nous regarder nous aussi comme il a regardé Pierre, au moment propice, avec ses yeux bienveillants, et de nous convertir.
Pierre, le converti, est appelé à affermir ses frères. Ce n'est pas un fait extérieur que cette tâche lui soit confiée au Cénacle. Le service de l'unité a son lieu visible dans la célébration de la sainte Eucharistie.
Chers amis, pour le Pape c'est un grand réconfort que de savoir qu'au cours de chaque Célébration eucharistique, tous prient pour lui ; que notre prière s'unit à la prière du Seigneur pour Pierre. C'est seulement grâce à la prière du Seigneur et de l'Église que le Pape peut accomplir sa tâche d'affermir ses frères - de paître le troupeau de Jésus et de se porter garant de cette unité qui devient témoignage visible de la mission de Jésus de la part du Père.
« J'ai ardemment désiré manger cette Pâque avec vous ». Seigneur, tu nous désires, tu me désires. Tu désires te donner toi-même à nous dans la sainte Eucharistie, t'unir à nous. Seigneur, suscite aussi en nous le désir de toi. Renforce-nous dans l'unité avec toi et entre nous. Donne à ton Église l'unité, afin que le monde croie.
Amen.
Benoît XVI