Publié le 23 Octobre 2013
Justice et charité
En connaissant mieux ainsi l'élévation de la justice sous ses différentes formes, on verrait davantage ses rapports avec la charité, qui doit la vivifier d'en haut.
Ces deux vertus ont ceci de commun qu'elles règlent les bons rapports avec les personnes. Mais elles diffèrent l'une de l'autre : la justice nous prescrit de donner à chacun ce qui lui est dû et de le laisser user de son droit.
(par ex.
Summorum Pontificum bof comme ça par hasard !
tout et, pour l'amour de Dieu, notre prochain commed'autres nous-mêmes comme nous-mêmes. Elle dépasse donc de beaucoup le respect du droit des autres, pour nous faire traiter les autres personnes humaines comme des frères en Jésus-Christ, que nous aimons dans l'amour de Dieu.
Bref, comme le montre bien saint Thomas, la justice regarde le prochain comme une autre personne, en tant qu'autre, la charité le regarde comme un autre nous-méme. La justice respecte le droit d'autrui, la charité donne au-delà de ces droits par amour de Dieu et de l'enfant de Dieu. Pardonner veut dire donner au-delà.
On s'explique ainsi que, comme le dit saint Thomas, « la paix (qui est la tranquillité de l'ordre dans l'union des volontés) est l'oeuvre de la justice, d'une manière indirecte, en ce sens que la justice écarte les obstacles à la paix (tels que les torts, les dommages). Mais la paix est directement l'oeuvre de la charité, parce que, de sa nature propre, la charité produit la paix. L'amour est en effet une force unitive; et la paix est l'union des coeurs et des volontés ».
Les vertus annexes à la justice dans la vie chrétienne
La justice, ainsi vivifiée par la charité, s'accompagne de plusieurs autres vertus qui lui ressemblent. Parmi elles, il v en a même une qui lui est supérieure, c'est la de vertu de religion, qui rend à Dieu le culte qui lui est dû, culte intérieur et extérieur, dévotion (ou promptitude de la volonté au service de Dieu), prière, sacrifice d'adoration, de réparation, de supplication, d'action de grâces. Cette vertu s'oppose à l'irréligion ou impiété et aussi à la superstition. Elle nous rappelle en même temps le culte de dulie dû aux saints et celui d'hyperdulie dû à la Mère de Dieu. La religion vient ainsi au-dessous des vertus théologales. A la religion doit s'unir la pénitence, pour réparer l'offense faite à Dieu.
A la justice se rattachent aussi la piété filiale envers les parents et envers la patrie, le respect dû au mérite, à l'âge, à la dignité des personnes, l'obéissance aux supérieurs, la reconnaissance pour les bienfaits reçus, la vigilance à punir justement quand il le faut, tout en usant aussi de clémence, enfin la véracité dans les paroles et dans la manière d'être et d'agir. Cette véracité, qui est une vertu, est différente de la franchise, simple inclination de tempérament, qui frise parfois l'insolence et qui oublie que toute vérité n'est pas bonne à dire.
La justice nous rappelle qu'à côté du droit strict il y a les droits el les devoirs de l'amitié (jus amicabile), par rapport à ceux qui nous sont plus intimement unis. Il y la aussi, à l'égard des personnes en général, les devoirs de l'amabilité qui s'oppose à l'adulation et au litige ou contestation inutile y a enfin ceux de la libéralité qui évite à la fois l'avarice et la prodigalité.
Tout cela est fort important dans la conduite de la vie, et parfois les personnes qui se donnent à la piété n'y pensent pas assez, elles prennent un peu trop des airs d'ermite, d'une façon plus égoïste que vertueuse. Il arrive même que, sous prétexte de charité, par un zèle amer, nous manquons à la charité et à la justice par jugement téméraire, médisance, insinuation contre le prochain.
Si, au contraire, on pratiquait généreusement les vertus dont nous venons de parler, la volonté serait grandement rectifiée et fortifiée, mieux disposée à vivre des vertus plus hautes encore d'espérance et de charité, qui doivent nous unir à Dieu et nous conserver cette union au milieu des circonstances variées de l'existence, au milieu même des plus pénibles et des plus imprévues.
Se montrer chrétien jusque dans les moindres actes de la vie, là est le vrai bonheur de celui qui marche à la suite de Notre-Seigneur.
Saint Thomas a décrit les vertus cardinales infuses à leur degré éminent lorsqu'il a dit : ( La prudence méprise alors toutes les choses du monde pour la contemplation des choses divines; elle dirige toutes les pensées de l'âme vers Dieu. La tempérance abandonne, autant que la nature le peut supporter, ce qu'exige le corps. La force empêche l'âme de s'effrayer devant la mort et devant l'inconnu des choses supérieures. La justice enfin porte à entrer pleinement dans cette voie toute divine . » Ce sont là les virlutes purgatoriae, les vertus purifiantes; plus haut encore, selon saint Thomas, sont les vertus de l'âme pleinement purifiée « virlutesam purgali animi, celle des grands saints ici-bas et des bienheureux au ciel ».
On voit par là la grandeur de la vertu de justice, seconde vertu cardinale. Elle est supérieure à la force, à la tempérance et même à la virginité.
Souvent, ce mot de justice n'est plus pour certains qu'un mot vide de sens; alors l'injustice qu'il faut parfois subir rappelle le prix de la justice, sa valeur réelle.
Ce grand réalisme apparait surtout dans la béatitude évangélique « bienheureux ceux qui ont faim el soif de justice, car ils seront rassasiés. » Il s'agit ici de la justice au sens le plus élevé et qui contient éminemment tout ce que nous venons de dire.