Quinzième Dimanche après la Pentecôte: salvum fac servum tuum »

Publié le 28 Août 2016

 

 

« Prête l’oreille Seigneur»
« Inclina, Domine, aurem tuam ad me »

« Sauve ton serviteur qui espère en toi »
« Salvum fac servum tuum ».

« Réjouis l’âme de ton serviteur »
« Laetifica animam servi tui »

« Car vers Toi, Seigneur, j’élève mon âme ».

Oh ! Quelle magnifique prière de l’âme chrétienne !
De cette prière, de son objet, nous en avons une magnifique intelligence dans l’Evangile de ce dimanche, une magnifique illustration.

C’est en effet l’évangile de la résurrection de l’enfant de la veuve, à la porte de Naïm où l’on voit NSJC « porter son attention sur la misère de cette veuve…et lui redonner son fils ». Il « incline » son regard vers la veuve et sa peine…Avec cet exemple évangélique, avec cette contemplation, gardée en mon cœur, de Jésus se penchant vers la veuve…je peux faire mienne cette prière de l’Introït et l’adresser à NSJC : « Inclina Domine aurem tuam », comme tu le fis sur le chemin de Naïm en regardant cette femme. Je peux m’enhardir et crier, à mon tour, comme le psalmiste : « Inclina aurem tuam ad me…Exauce ma prière…Sauve ton serviteur, comme tu sauvas jadis à Naïm et le fils et la mère. « Laetifica animam servi tui » « Réjouis l’âme de ton serviteur » comme jadis, à la porte d’une ville, Naïm, tu réjouis le cœur de la mère, affligée, déjà veuve, lui redonnant son fils unique.

Ainsi l’introït de cette messe et l’évangile s’appellent l’un l’autre. L’évangile est la meilleure illustration possible de la vérité de la prière exprimée dans l’Introït. Cet évangile nous montre la compassion en acte de Jésus à l’égard de la veuve. Fort de cet exemple, nourri de cet exemple, je peux crier vers Dieu cette prière de confiance : « Inclina aurem tuam, Domine ad me », « Incline Seigneur, ton oreille vers ton serviteur ».
Mais cette compassion, ce désir de faire le bien, qui fut l’âme même du ministère de NSJC doit être également l’âme de tout chrétien. Et c’est l’enseignement de l’Epître de ce dimanche : « Ainsi donc, nous dit Saint Paul, durant le temps qui nous est donné, pratiquons le bien à l’égard de tous, mais surtout à l’égard de nos compagnons de la foi… »… Comme le Christ le fit…et avec quelle douceur, à l’égard de la veuve de Naïm.

Voilà encore une belle messe, très bien construite, dans une belle unité de sentiments où tous les textes concourent à justifier et le choix du psaume 85, 1-4 de l’Introït que nous venons de citer et du psaume 39, 2-4 de l’Offertoire : « Expectans exspectavi Dominum et respexit me et exaudivit deprecationem meam ». « Il a entendu mon appel et il a mis en ma bouche un cantique nouveau, une hymne à notre Dieu » : « un grand prophète s’est levé parmi nous et Dieu a visité son peuple ».

 

Suivons NSJC dans le récit de cet évangile de la veuve de Naïm.

NSJC fait route vers Naïm, accompagné de ses disciples, « cum eo discipuli eius », mais aussi d’une foule nombreuse. « Et turba copiosa ». Ce mot « copiosa » vient de « copia » qui veut dire « abondance ». C’est la fortune, c’est la richesse, la foule, le grand nombre. Et « copiosus » veut dire : « qui possède en abondance…opulent, copieux, abondant. Or « turba » c’est déjà la multitude, le grand nombre, c’est la foule nombreuse et mêlée.

Voici qu’il approche de la porte de la ville de Naïm. Un cortège funèbre se présente au même instant. L’évangéliste nous le décrit. On porte un mort « defunctus ». Mais il précise : c’est un fils unique, « filius unicus », « filius unicus matris suae », littéralement « un fils unique de sa mère ». Mais plus encore : voilà que la mère de ce fils unique était déjà veuve. Elle avait donc mis en lui, vraisemblablement, toute sa consolation. Elle avait reporté sur lui, son unique, son affection de mère, une veuve. Son veuvage était un peu égaillé, tout de même, par la présence de son fils. On peut ainsi mesurer la désolation de cette mère, sa tristesse, sa douleur.

Sa douleur, du reste, fut ressentie par les gens de la ville. Dans de telles circonstances, la compassion est réelle et s’exprime spontanément. Le plus grand nombre a voulu s’unir à sa peine et lui porter quelques consolations, lui manifester son estime et sa compassion. Et de fait, la ville s’était émue de tant de malheurs répétés…L’évangéliste remarque, de fait, la « grande foule » qui accompagne la veuve. « Et turba civitatis multa cum illa ».

Cela dut faire du monde à la porte de la ville…un peu comme à Cologne autour du Pape…La foule « copiosa » avec Jésus, la foule « multa » avec la veuve de Naïm.

Et dès que Jésus la vit, il eut lui aussi de la compassion : « Quam cum vidisset Dominus misericordia motus super eam ».

Sa miséricorde est spontanée. Elle jaillit spontanément de la vue de ce spectacle. Dès qu’il la voit, il est ému. C’est cette vision qui engendre sa désolation, son émotion, sa compassion « super eam ».

Ce sont les « larmes » de cette femme qui l’émeut. NSJC a du coeur. Il est bon, compatissant.

Il lui dit : « Ne pleure pas ». Il fait arrêter les porteurs et se tournant vers le fils unique mort, lui dit d’une voix forte : « Jeune homme, « adolescens » je te l’ordonne, lève toi, « tibi dico, surge ». Il y a de l’énergie dans cet ordre. Il met sa toute puissance au service de sa miséricorde.
Et le mort se redressa et s’assit et il se mit à parler. Il y a de l’énergie dans cette scène. Il n’y a rien de mièvre, rien de mou. La mollesse, la mièvrerie ne sont pas les « compagnons » de la compassion !

Et le geste final est remarquable, d’une délicatesse merveilleuse, d’une noblesse parfaite. Avec quelle douceur et sourire, Jésus dut remettre l’adolescens à sa mère : « et dedit illum matri suae ».

Voilà une très belle action traduite par quatre verbes : « tibi dico : surge » et celui qui était mort « resedit » et « coepit loqui » et Jésus « dedit illum matri suae ».

Et la conclusion de la scène est fabuleuse : tous magnifient Dieu : « Magnificabant Deum ». Ils le glorifiaient. Ils chantaient sa gloire comme Notre Dame dans son « Magnificat ». C’est le même verbe : « magnificare »

Ainsi cette scène évangélique justifie amplement la prière de l’Introït.

Je peux moi aussi Le supplier, Le prier. Je sais qu’Il est attentif à la misère. Il le fut à Naïm. Et je peux lui dire : « Inclina Domine aurem tuam ad me » Je peux lui dire « d’incliner son oreille vers moi ». Il est sensible à la peine. Il le fut à Naïm.

Il y a de la tendresse affectueuse dans cette prière. Le choix du mot « inclinare aurem tuam » exprime bien cette délicatesse, cette affection. Je fais appel à la tendresse de mon « bienfaiteur ». Et c’est normal. Celui, du reste, qui a de la compassion, a aussi de la douceur, de la prévenance. Tel est Notre Dieu qui s’est révélé en NSJC, à la porte de Naïm.

Je peux lui dire dans ma détresse : « salvum fac servum tuum », « Sauve ton serviteur, toi qui a sauvé l’enfant de la veuve »… Je peux « espérer en Toi », je peux espérer être sauvé…par celui qui a appelé de la mort à la vie, l’enfant de Naïm, le fils de la veuve.

Je peux lui dire aussi « Miserere mihi », aie pitié de moi, Toi qui as eu aussi pitié de la douleur de cette femme de Naïm. Toi qui as su, remettant l’enfant à sa mère, réjouir profondément son cœur…Je peux également Te supplier de réjouir, cette fois, mon âme : « Laetifica animam servi tui », comme hier tu le fis pour cette veuve.

Alors s’il en est ainsi, avec le palmiste, je peux, à juste titre, chanter le psaume de l’Offertoire : « J’ai mis tout mon espoir dans le Seigneur »…. « Il s’est penché vers moi » : « respexit me ».


« Respicere » veut dire : regarder, arrêter ses regards sur… Tourner ses regards vers…Mais, dans ce verbe, il y a aussi une nuance d’affection. C’est un regard de bonté. C’est le verbe utilisé par Saint Jean dans la scène douloureuse de la trahison de Saint Pierre. Et c’est ce regard du Christ, plein d’affection qui toucha le cœur de Pierre après son reniement : « Respexit illum ». « Et se tournant il le regarda… » et Saint Pierre se retira pleurant amèrement.

Et il a mis en ma bouche un cantique nouveau, « hymnum Deo nostro », une hymne à Notre Dieu…comme hier, à la porte de Naïm, il fit chanter par cette immense foule, les « mirabilia Dei ».

Alors on comprend aussi à la lumière de cet évangile de Jésus à la porte de Naïm, le choix du « Graduel » et de l’ « Alleluia » : « Il est bon de louer le Seigneur, de chanter ton nom, d’annoncer ta miséricorde dès le matin et ta fidélité jusque dans la nuit ». « Alleluia, c’est un grand Dieu que le Seigneur. Il a ressuscité de la mort l’enfant de la veuve ».


Et puisque je suis dans l’admiration de la compassion de notre Dieu en NSJC, puisque j’admire sa miséricorde, ce cœur qui fait du bien, qui a su être attentif à la douleur de la femme, je dois avoir moi-même même miséricorde, même compassion. Et comme Lui aimer à faire le bien. Mais c’est l’enseignement de l’Epître : « Agissez, nous dit saint Paul, vous les spirituels dans un esprit de douceur ». En latin c’est « in spiritu lenitatis ». « Lenitas » veut dire douceur, tendreté, bonté, clémence, indulgence, paisiblement. On dira, en ce sens que « ce fleuve a un cours paisible ». « Lenitudo » se traduit par « douceur, bonté ». Ainsi agir « in spiritu lenitatis », c’est agir avec douceur et bonté. C’est l’ordre de saint Paul….Mais parce que d’abord ce fut l’attitude du Maître devant la femme à la porte de Naïm, comme elle le fut devant la femme prise en flagrant délit d’adultère…. Il faut avoir même agir. C’est l’attitude du prêtre.

Et Saint Paul insiste une deuxième fois : « Faisons le bien sans nous lasser ». Et encore une troisième fois, à la fin de son texte : « operemus bonum ad omnes », « pratiquons le bien à l’égard de tous, mais surtout à l’égard de nos compagnons dans la foi ».

 

abbé Paul Aulagnier.

Rédigé par Philippe

Publié dans #spiritualité

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