fête des mères: maman, le Saint-Esprit . (1)

Publié le 16 Mai 2017

   Dans l'ordre surnaturel, nous sommes donc des enfants et qui, de plus, ne sont pas nés dans cette condition divine. La vie divine n'est pas notre vie originelle, notre être propre et naturelle.

   La grâce sanctifiante, en laquelle nous avons reçu communication de la nature divine, est survenue en nous alors que nous existions déjà dans notre être naturel et humain et comme une réalité d'autre sorte, comme une addition foncièrement nouvelle et d'ordre bien différent. La grâce est en nous comme quelque chose de surajouté à notre propre nature, de survenu du dehors et de transcendant.  Le monde divin où nous avons été introduits n'est pas notre monde natal. La vie divine en nous est une vie surnaturelle.

   ... La vie divine est analogue à celle d'un enfant ramassé dans la rue ou même dans le ruisseau et introduit soudain dans une splendide et solennelle demeure. 

Le maître du logis a décidé d'en faire son fils. On le nettoie, on l'habille, on l'introduit dans le plus intime de la famille. Le voici adopté. Il est devenu légalement le fils et l'héritier. Il en a publiquement le nom, le rang, les droits . Il lui reste à en faire le personnage et à en mener la vie. C'est le plus difficile. Tout lui est nouveau, tout l'étonne et le déroute, le pauvre enfant, dans cette demeure où il  n'a pas eu son berceau, dans ce milieu si différent de son milieu natal. Le langage et les manières, les pensées et les sentiments, tout lui est étranger, il a tout à apprendre. Les amusements eux-mêmes qu'on lui propose le laissent perplexe ou indifférent. Son père, cependant, pour en prendre soin et l'initier à sa vie nouvelle, l'entoure de serviteurs choisis. Ce personnel imposant ajoute, par sa présence au trouble du petit enfant dépaysé.  Et il n'est pas jusqu'à la bonté et aux caresses de ce père qu'il ne connaît pas, si grand, qui ne concourent à l'intimider. L'enfant est là, n'osant bouger, avec comme une envie de pleurer et de s'enfuir. Il lui faudrait une mère. Il cherche une mère.

   Dans la famille et la maison de Dieu où nous avons été introduits comme des fils, notre situation est pareille.

Meilleure à certains égards, elle est plus difficile à d'autres. Elle est meilleure, car notre Père a fait pour nous ce que ce père de la terre ne pouvait faire pour l'enfant qu'il adoptait. Avec la grâce sanctifiante, son sang divin coule désormais dans nos veines. Les vertus surnaturelles dont il nous a enrichis nous rendent capables de penser, d'aimer, d'agir en fils de Dieu. Elle est néanmoins plus difficile, car la distance est plus grande entre le monde divin et notre monde natal qu'entre la boue de la rue et du palais.  De la vie humaine, à la vie divine, quel changement ! Comme le petit enfant dépaysé, perdus, nous aussi dans la demeure divine, pour nous rassurer, nous acclimater, nous initier, nous voudrions une mère, nous cherchons une mère. Ou plutôt, non. Nous ne la cherchons pas, car nous la possédons.

   Dans l'ordre de la vie surnaturelle, je veux dire pour ce qui regarde notre initiation aux moeurs divines et notre éducation de fils de Dieu tout petits, le Saint-Esprit, qui nous est donné, qui habite en nous, avec nous tient le rôle de mère.

   Etonnant mystère! Peut-être. Mais , entre les trois personnes divines, le Saint-Esprit était désigné pour tenir ce rôle, s'il devait l'être par l'une d'elles .

   Et pourquoi non?

   Dieu n'abandonne pas le soin de ses fils à des bonnes et à des gouvernantes. Il s'en charge lui-même en premier. Or entre les propriétés personnelles du Saint-Esprit et celles qui caractérisent la mère, l'affinité est indéniable. De toutes les personnes divines, il est celle qui, de façon plus spéciale, nous est "donnée". Il est par excellence le don de Dieu et il en prend le nom. Dans la Trinité encore, il est l'Amour; c'est l'un de ses noms propres aussi . Mais ces qualifications conviennent à la mère plus qu'à personne autre et, en quelque sorte, la définissent. Nul être , sur la terre, ne nous est "donné" comme notre mère et elle personnifie l'amour , dans ce qu'il a de plus désintéressé, de plus généreux, de plus dévoué .

   Ces considérations ne sont pas décisives. Je le sais. Mais les faits le sont et les témoignages divins aussi, plus clairs encore et plus exprès que les faits.

   De la vie divine en nous, le Saint-Esprit n'est pas seulement le moteur comme Dieu l'est de notre activité naturelle. Son rôle a quelque chose de beaucoup plus spécial. Saint Thomas , dont le jugement surnaturel est si pénétrant et si ferme, l'a très bien quoique succinctement expliqué dans sa doctrine des dons ...Le Saint-Esprit, par ses dons, supplée à ce qui nous manque pour exercer tout seuls et pleinement, pour conduire sûrement et facilement notre vie surnaturelle.

Or si nous sommes fondés, nous autorisant du langage de l'Ecriture, à définir cette relative impuissance , cette condition imparfaite, comme un état d'enfance surnaturelle, nous le sommes donc aussi à assimiler l'assistance que nous recevons du Saint-Esprit à celle que les autres petits enfants de la terre reçoivent de leur mère.

   Mais le Saint-Esprit n'intervient pas dans notre vie surnaturelle uniquement par ses dons.. Nous recevons de lui d'autres secours et d'autres soins dont le caractère maternel est indéniable.

   Il est une strophe de la séquence Veni sancte Spiritus dont il me semble qu'on n'épuise pas le sens et qu'on méconnaît la simple et émouvante beauté si on ne l'interprète pas dans cet esprit:

  Lava quod est sordidum,

Riga quod est aridum,

Sana quod est saucium.

   Nous savons bien qu'en dépit du neutre, il ne s'agit point de choses mais de personnes, c'est-à-dire des enfants de Dieu, de nous-mêmes. Et cela veut dire, au fond :

Lave ce qui est souillé,

Donne à boire à qui a soif,

Guéris qui s'est blessé.

 

   Le petit enfant est toujours sale, le petit enfant a toujours soif, le petit enfant se blesse à tout propos. Et ces besognes maternelles, s'il en fut, à qui, parlant au nom de l'Eglise de Dieu demandons-nous de les accomplir?  Au Saint-Esprit.

   La strophe qui suit s'inspire de la même implicite assimilation du Saint-Esprit à la mère.

   Tâche maternelle aussi et l'une des plus sacrées que celle d'apprendre au petit enfant à connaître son père. Que de soins elle se donne, la mère, pour y parvenir !

   " Incipe, parve puer, risu cognoscere patrem;

Quelle joie surtout lorsqu'il articule pour la première fois, de ses lèvres puériles, le mot à nous aussi et de façon bien plus intime. Or ce témoignage que le Saint-Esprit nous rend au sujet de Jésus, quel peut en être l'objet si ce n'est de nous introduire dans la connaissance vraie et le confiant amour du Fils de Dieu, notre Aîné?

   Cela aussi dans nos familles humaines, c'est le rôle des mères, c'est un office maternel.  Devant son enfant tout petit, la mère est comme la répondante nécessaire, sur la foi de laquelle il consent à entrer en rapports avec  son père et ses frères. Elle aussi rend témoignage, et pour l'enfant qui ne sait pas bien, qui a un peu peur, son témoignage décide de tout.

   Les rôles, en vérité, sont analogues, celui du Saint-Esprit dans l'ordre de nos relations divines, et celui de la mère dans celui de nos rapports humains et cette analogie est profondément émouvante .

 

 

Rédigé par RP LEMONNyER op /

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