Dimanche des Rameaux - homélie dom Jean Pateau, Fontgombault
Publié le 24 Mars 2024
+ DIMANCHE DES RAMEAUX
Homélie du Très Révérend Père Dom Jean PATEAU
Abbé de Notre-Dame de Fontgombault
(Fontgombault, le 24 mars 2024)
Chers Frères et Sœurs, Mes très chers Fils,
En ce dimanche des Rameaux, entrons au cœur de l’année liturgique. Revivons les jours, les heures, où le mystère de notre rédemption s’est accompli dans la passion, la mort et la résurrection du Christ.
Occasion nous est offerte de renouveler notre présence lors de nos communions, si fréquentes et souvent trop matérielles, au Corps et au Sang rédempteurs du Christ. Plus que jamais, le monde et l’homme ont besoin de puiser à ce mystère de miséricorde, de réconciliation. Plus que jamais pourtant, le monde et l’homme semblent s’émanciper de Dieu, de ses lois et de son plan de salut.
Vaut-il encore la peine d’adresser une parole à une société qui se félicite d’avoir pu inscrire dans le marbre de sa Constitution, le meurtre délibéré de l’enfant innocent dans l’enceinte protectrice et nourricière du sein maternel, et qui considère cela comme un grand pas dans la liberté ? Quelle liberté ? La tentation du désespoir est grande : désespérer de l’homme, désespérer du monde, désespérer de Dieu. Souvenons-nous de la parabole du juge inique, importuné par une veuve et qui finit par lui rendre justice. (cf Lc 18,2-8)
Le Seigneur a pour but d’inviter ses disciples à prier sans se décourager. Faciem tuam, Domine, requiram. C'est ta face, Seigneur, que je cherche. (Ps 26,9) Sa conclusion est sans appel : « le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » (v.8)
Il ne s’agit pas pour le Seigneur de nous inviter à juger de la foi de nos contemporains et de nous lamenter : Croient-ils en Dieu ? Aux dogmes de foi ? La question n’est pas là.
La question ne leur est d’ailleurs pas adressée. Elle est adressée aux disciples. Elle est adressée à chacun d’entre nous. Le Seigneur, quand il reviendra, trouvera-t-il la foi dans notre propre cœur ? Mais que nous demande le Seigneur ? Nous croyons en Dieu
. C’est vrai, mais ce n’est pas suffisant. C’est au Christ, Dieu et homme, créateur et rédempteur, qu’il s’agit de croire ; rédempteur non pas selon le chemin que nous aurions choisi... mais selon le chemin qu’il a librement choisi : donner sa vie pour ses amis par le supplice humiliant, dégradant de la crucifixion.
Alors que le Seigneur venait d’évoquer sa Passion prochaine, Pierre avait-il la foi quand, prenant Jésus à l’écart et se mettant à lui faire de vifs reproches, il lui disait : « Dieu t’en garde, Seigneur ! cela ne t’arrivera pas. » (Mt 16,22) ?
Et pourtant, c’est arrivé... Alors que déferlaient sur l’Innocent des torrents de haine, le mystère de notre réconciliation s’accomplissait.
Les temps que nous vivons suscitent des questions, des inquiétudes, mettent à rude épreuve notre foi. Croyons-le, à travers ce temps qui est le nôtre, le mystère de la rédemption poursuit son chemin. Dieu tient toutes choses en sa main. Nul événement ne le prend de court. Sa miséricorde demeure toujours aussi féconde, si un juste, portant son regard sur le Crucifié, accueille en lui les traits de ce visage, et comme lui, offre sa vie pour ses amis en témoin du Crucifié.
Au paroxysme de la haine, le sommet du Golgotha est le sommet de l’amour et de l’espérance. Là, le Christ nous invite à poursuivre son œuvre dans le monde : « Viens et suis-moi. » Pas de vendredi saint sans un matin de Pâques.
Amen.