Avec Marie pendant l'Avent

Publié le 28 Novembre 2009




Quand on n'a jamais essayé, on croit que, pour établir en soi le silence, c'est facile et qu'il suffit de le vouloir. Mais dès qu'on essaie en vérité, on voit combien c'est difficile, combien c'est une des choses dont nous sommes le moins capables, et sur lesquelles notre volonté a le moins de pouvoir.

 

 

 Le désir du silence

 

 Lorsqu'une âme a découvert la Présence, l'intimité, la vie d'oraison, elle ne désire que se tenir humblement en face de son Seigneur dans le vide et la plénitude du silence.

 Elle a compris, elle a connu intérieurement que Dieu existe, qu'Il est présent en elle et qu'Il l'aime.

 Elle n'a plus qu'une soif, se plonger en ce silence qui répond à la Présence, demeurer en cette attention et ce regard simple où se résume la contemplation.

 Et elle tente d'instaurer en soi le silence.

 

 Les difficultés du silence

 

 Alors, à part peut‑être de brèves périodes de grâce, elle éprouve douloureusement son impuissance à éliminer le bruit. Si ferme que soit son vouloir, elle se surprend sans cesse en flagrant délit de bavardage intérieur, de curiosité, de dispersion. Le bruit suinte en elle de mille fissures imperceptibles. Labeur épuisant et vain de les colmater l'une après l'autre, elles se rouvrent toujours sous la poussée du ressac inépuisable.

 La seule ressource qui lui reste (comme toujours au plan surnaturel) - après avoir pris certaines mesures qui peuvent s'indiquer : préparation de l'oraison, recours aussi à des techniques psychologiques qui permettent d'être mieux maître chez soi - c'est de demander ce qu'elle ne peut acquérir ; d'obtenir à force de supplications et d'humilité ce qu'elle ne peut réaliser elle‑même. Du fond de la misère et de l'impuissance, implorer, mendier le don royal du silence.

 Elle lève les yeux vers les montagnes. D'où lui viendra le secours ? (adaptation du Ps 121, 1)

 

Je suis l'lmmaculée Conception

 

L'Église, guidée par l'Esprit, a pris de plus en plus clairement conscience de l'éblouissant privilège, et Marie elle‑même l'a confirmé à Bernadette.

 Du trésor ancien, des choses nouvelles ont été tirées, mises en valeur comme jamais, offerte dans toute leur splendeur à notre foi, à notre amour, et à notre contemplation : la merveille de cette créature intacte en tout son être, qui à aucun instant n'a été effleurée par un péché ni un refus.

 Et nous cherchons à pénétrer le mystère de Marie. Nous nous demandons comment pouvait se traduire en elle, au plan de la conscience psychologique, la grâce si extraordinaire d'une intégrité absolue. Connaissance de cette perfection unique ? Rien ne le donne à penser.

 Que nous a‑t‑elle livré d'elle‑même ? Nous scrutons les textes si rares de l'Évangile. Que suggèrent‑ils du secret de Marie ?

 Voici la servante - Mon âme magnifie le Seigneur - Elle gardait tout dans son cœur -

 Mon Fils, nous te cherchions, tout affligés -

 Ils n'ont plus de vin - Faites tout ce qu'il vous dira.

 Un mystère d'humilité, de simplicité, d'effacement. Marie vivait de foi, infiniment plus que nous.

 Il n'est certes pas nécessaire de supposer une révélation spéciale qui l'avertisse de sa préservation miraculeuse : ce serait plutôt contraire à la ligne si pure de cette vie de foi.

 

Mais comment, dans sa vie quotidienne, dans le cours de son travail, de ses tâches ménagères, comment s'exprimait au plus intime d'elle‑même cette perfection merveilleuse ?

 

Le premier fruit devait en être le silence.

 

 Si, pour nous, il est si difficile, c'est à cause de toutes ces fissures, de toutes ces fêlures que notre héritage de péché a laissées en nous, et que nous‑mêmes avons aggravées comme à plaisir : nous ne pouvons empêcher les distractions de sourdre, elles viennent de partout.

 Marie est vierge dans tout son être, une femme intacte : seule cette densité de diamant peut contenir la plénitude du silence.

 Pleine de grâce elle est conçue. Pleine de grâce elle vit.

 Jardin fermé : rien qui s'échappe ou s'évapore.

 Fontaine scellée : rien qui bruisse ou qui clapote. Silence pur et infrangible de la seule fille d'Adam qui ne se soit jamais évadée dans le multiple et le divers.

 Toute sa vie n'est qu'attention soutenue à son Créateur, regard dans la nuit et la clarté de la foi, oui parfait et incessant à son Dieu.

 Son âme est vierge dans toute sa profondeur, et la virginité d'un esprit est d'abord silence.

 "Voici votre Mère"

 Cet abîme de pureté nous intimiderait peut‑être, mais elle n'est pas seulement Vierge, elle est Mère : le Seigneur mourant sur la croix nous l'a donnée lorsqu'il a dit à saint Jean qui nous représentait tous : "Voici ta Mère". A elle‑même, déjà, il avait dit : "Femme, voici ton Fils".

 Cette appellation insolite, "Femme", est une allusion à la Genèse. Jésus proclame ici que sa Mère tient désormais le rôle que la femme, la première "Mère des vivants", tenait au début de la création : la Mère de Dieu est devenue la Mère des hommes.

 Elle est la nouvelle Ève de la nouvelle Alliance.

 Au moment ultime où son cœur va être ouvert, le Seigneur nous a livré le fond de sa tendresse divine en nous révélant la maternité spirituelle de Marie, mystère qui donne tout son sens au mystère de sa virginité.

 Si la Vierge Immaculée seule, dans sa pureté de cristal, connaît la plénitude du silence, seule aussi dans sa générosité de Mère, elle peut le dispenser.

 

 Le secret du silence

 

 

 Et voici que s'ouvre devant nous le secret du silence.

 Il n'est pas au terme d'une lutte et d'une violence : nous avons assez expérimenté que nos efforts, trop souvent, créaient une tension, elle-même destructrice du silence.

 En face du mystère de Marie, nous comprenons que le silence est plutôt le fruit d'un consentement, d'une dépossession, qui établit l'âme dans la paix : un geste d'abandon crée cette détente qui est la condition même du silence que nous mendions.

 Nul besoin de phrases, ni de bruit d'aucune sorte : il suffit de se livrer, avec toute la confiance d'un enfant.

 Une mère ne laisse pas ses enfants en haillons. Sitôt que nous avons déchiré le silence, revenons à elle avec la simplicité des petits enfants, dix fois par minute, s'il le faut. Et chaque fois, c'est de son silence immaculé que la Vierge nous revêtira.

 Et chaque fois, nous découvrirons un peu plus le mystère de l'lmmaculée Conception et de la maternité spirituelle. Et ainsi, tout au long de notre vie où mûrit la joie éternelle, nous pénétrerons toujours plus dans le silence même de Marie, maîtresse d'oraison et mère de toute grâce.

 

 

 

(Sœur Jeanne d'Arc. Un cœur qui écoute. Ed DDB -Coll. Voie spirituelle)

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Rédigé par philippe

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